Contenu du sommaire : Les langues du procès
Revue | Les cahiers de la justice |
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Numéro | no 2024/2 |
Titre du numéro | Les langues du procès |
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Éditorial
- Une autre réponse à la barbarie : American Mother de Colum MacCann - Denis Salas p. 169-172
Tribune
- « J'y suis été » : Actualité de l'affaire Dominici - Michel Laval p. 177-182
Dossier. Les langues du procès
- Entre voilement et dévoilement : Présentation du dossier - Sandra Travers de Faultrier p. 183-189 Au cœur du judiciaire se trouve la langue. Juridique bien sûr elle est aussi celle des autres, ces non-professionnels du droit qui, avec leurs métiers, leurs origines sociales et régionales, leurs générations et trajectoires de vie, leurs rôles et places sur la scène judiciaire exigent implicitement des juristes accueil, attention et travail de traduction. Car la langue commune est habitée de langues incarnées qui appellent une traduction là même où il n'y a pas lieu de parler de langues étrangères.
- « L'audience c'est ici et maintenant » : Dans l'atelier du juge chargé du procès dit des suicides chez France Télécom - Cécile Louis-Loyant p. 191-205 Cet article se propose de retracer le travail personnel exigé par la juge qui a présidé l'audience du procès dit « des suicides chez France Télécom » qui s'est tenu en juin 2018. Elle s'est efforcée d'analyser, plus de trois ans après, à la demande des Cahiers de la justice le travail qu'a nécessité cette audience : temps de préparation du dossier, application du délit de harcèlement moral, prise en compte des victimes absentes et présentes, et surtout, confrontation entre la langue du droit et celle de l'entreprise. L'analyse livrée dans ces pages, rédigée à la première personne, n'engage que l'autrice, et non les autres magistrats qui composaient la collégialité.With the judge in charge of the trial into the France Télécom suicides
This article sets out to retrace the personal work required by the judge who presided over the hearing of the trial into the “France Télécom suicides” held in June 2018. More than three years later, at the request of Cahiers de la justice, she endeavoured to analyse the work involved in this hearing: the time taken to prepare the case, the application of the offence of psychological harassment, taking into account victims who were either present or absent, and above all, the confrontation between the language of the law and that of the company. The analysis in these pages, written in the first person, is the sole responsibility of the author, and not of the other judges on the panel. - Interpréter est un art : Un magistrat et un écrivain doivent ici pouvoir s'entendre - Jean-Philippe Pierron p. 207-218 Le droit, dans sa positivité, se méfie de la littérature, de ses expressions non seulement floues mais molles. Le droit ce n'est surement pas de la littérature, et le conflit des facultés opposant faculté de droit et faculté des lettres en honore depuis longtemps institutionnellement l'opposition. L'exactitude du dit du droit positif se construit en s'opposant à la rectitude de l'image métaphorique dans le dit poétique. Mais l'opposition est-elle si manichéenne ? Au-delà des querelles entre positivisme juridique et approche compréhensive, le littéraire et le juridique ne sont-ils pas bien plus entremêlés qu'il n'y paraît ? N'y-a-t-il pas du poétique dans le judiciaire (l'inventivité du dit du droit) et du juridique dans la littérature (la légalité de la langue et la chronique judiciaire comme thème…) ? S'en souvenir nous ouvre à penser la rationalité du droit comme dilatée et non pas diluée par ses liens avec les littératures. Ne sommes-nous pas reconduits, encore et toujours, en vue de la justesse du juste, à vivre les « forces imaginantes du droit » ?The law, in all its positiveness, is wary of literature, of its expressions that are not only vague but soft. Law is certainly not literature, and this opposition has long been honoured institutionally in the conflict between the faculties of law and literature. The accuracy of what is said in positive law is constructed by opposing itself to the rectitude of the metaphorical image in poetic language. But is this opposition quite so Manichean? Beyond the quarrels between legal positivism and the comprehensive approach, the literary and the legal might be much more intertwined than they seem. There is perhaps something poetic about all things legal (the inventiveness of the law) and something legal about literature (the legality of language and the judicial chronicle as a theme...). Remembering this opens us up to thinking of the rationality of law as diluted rather than diluted by its connections with literature. Are we not driven again and again to live out the “imaginative forces of law” in order to achieve justice?
- Transmettre la voix des accusés non francophones : une nécessité pour un procès équitable - Swati Sengupta p. 219-231 Dans le domaine complexe des procédures multilingues, la voix des accusés ou prévenus non francophones est fragile, risquant d'être négligée, mal interprétée, voire perdue au cours d'un procès. Les interprètes, en tant que professionnels linguistiques, jouent un rôle essentiel en comblant les écarts linguistiques pour garantir la fidèle transmission de la voix des accusés. Toutefois, leur efficacité dépend de divers facteurs, tels qu'une compréhension approfondie du contexte juridique et de la culture, ainsi que de la coopération des juristes. Cet équilibre délicat entre interprétation linguistique et pouvoir interprétatif des juges dans les procédures judiciaires multilingues est indispensable pour assurer la défense des droits des non-francophones.In the complex field of multilingual proceedings, the voice of non-French-speaking defendants is fragile, at risk of being overlooked, misinterpreted or even lost during a trial. As language professionals, interpreters play an essential role in bridging language gaps to ensure that the voice of the accused is faithfully transmitted. However, their effectiveness depends on a number of factors, such as a thorough understanding of the legal context and culture, and the cooperation of jurists. A delicate balance between linguistic interpretation and the interpretative power of judges in multilingual legal proceedings is essential in ensuring that the rights of non-French speakers are upheld.
- L'expert médical : précision de l'écrit et exigence de l'oralité - Marcel Guillot, Sandra Travers de Faultrier p. 233-236 L'expert médical est doublement traducteur. Porte-parole du corps qu'il examine, il use de la langue médicale, substrat rigoureux de ses constats, qu'il doit adapter à la langue du tribunal. Apprécier, estimer, conseiller, chiffrer, ses missions diverses dont les fruits sont recueillis dans des rapports écrits tendent à éclairer le juge. Une exigence scientifique qui, par la parole, peut s'enrichir d'une émotion, d'une nuance, soudain éclairantes voire déterminantes.Summary of an interview with Marcel Guillot
The medical expert is a translator on two levels. As a voice for the body being examined, the expert uses medical language as a rigorous foundation for their observations, which must then be adapted to the language of the court. Appraising, estimating, advising, quantifying: these various missions, the results of which are recorded in written reports, are intended to enlighten the judge. A scientific requirement which, through words, can be enriched by an emotion, a nuance, which may be suddenly enlightening or even decisive. - « Mettre ses pas dans les traces de l'autre » - Odile Barral, Sandra Travers de Faultrier p. 237-245 À l'audience, qui est au cœur de l'institution judiciaire, l'écoute de l'autre nécessite une attention constante et une formation du magistrat pour dépasser les différences de langage malgré la distance émotionnelle et (ou) socioculturelle. Être vigilant sur cet écart « linguistique » amène à s'interroger sur notre subjectivité dans la transcription écrite de nos audiences et de nos décisions et à rechercher inlassablement la formulation qui pourra être « entendue.Interview with Odile Barral, member of the judiciary
At court hearings, which are at the heart of the judicial institution, listening to others requires constant attention and training on the part of judges to overcome differences in language despite emotional and/or socio-cultural distance. Remaining vigilant about this “linguistic” discrepancy means questioning our subjectivity in the written transcription of our hearings and decisions, and tirelessly seeking the wording that will be “heard”. - L'avocat entre la langue du dossier et l'attente de son client - Jean-Paul Petreschi, Sandra Travers de Faultrier p. 247-250 Qu'il s'agisse d'une langue technique ou spécialisée comme c'est le cas dans les univers professionnels ou d'une langue propre à un secteur d'activité, l'avocat doit, face à un dossier, pouvoir exercer sa maîtrise de la qualification juridique en déchiffrant au plus près du réel la situation de celui dont il prend en charge la défense. Saisir le sens des mots comme des faits suppose une attention traductrice.Summary of an interview with maître Jean-Paul Petreschi
Whether it is technical or specialised language, as is the case in professional circles, or a language specific to a sector of activity, when faced with a case, the lawyer must be able to exercise their mastery of legal qualification by deciphering the real situation of the person they are defending. Grasping the meaning of words as well as facts requires careful translation. - La création d'un néologisme : le génocide : Autour des travaux de Raphaël Lemkin : Le Pouvoir de l'Axe en Europe occupée (1944) et Le Crime de génocide (1946) - Anne-Elisabeth Crédeville p. 251-263 L'élaboration du concept de génocide par Raphaël Lemkin est la conséquence d'une nécessité temporelle (l'extermination de groupes n'existe pas en tant que crime) et conjoncturelle (la lutte contre le nazisme). Si le terme de génocide ne reçoit pas de consécration juridique lors du procès de Nuremberg, la notion de crime contre l'humanité qui y est présente sera définie par la convention des Nations unies contre le génocide entrée en vigueur le 12 janvier 1951. Celui-ci se définit comme un crime de masse c'est-à-dire une agression ciblée et coordonnée dans tous les éléments qui fondent une nation. On y distingue deux phases : l'une est la destruction des caractéristiques nationales propres au groupe opprimé, l'autre l'instauration des caractéristiques propres à l'oppresseur. La nature juridique, morale et humaine du concept lui confère une dimension internationale. La guerre existe contre les États et leurs armées et contre leurs peuples mais le génocide s'exerce aussi en temps de paix et aboutit à la guerre.On the work of Raphaël Lemkin: Axis Rule in Occupied Europe (1944) and The Crime of Genocide (1946)Raphaël Lemkin's development of the concept of genocide is the consequence of a temporal necessity (the extermination of groups does not exist as a crime) and a conjunctural necessity (the fight against Nazism). Although the term genocide was not legally enshrined at the Nuremberg trials, the concept of a crime against humanity was defined in the United Nations' Genocide Convention, which came into force on 12 January 1951. This is defined as a mass crime, that is, a targeted and coordinated attack on all the elements on which a nation is based. There are two phases: the first is the destruction of the national characteristics of the oppressed group, and the second is the establishment of the characteristics of the oppressor. The legal, moral and human nature of the concept gives it an international dimension. War exists against States and their armies and against their peoples, but genocide is also practised in times of peace and leads to war.
- Entre voilement et dévoilement : Présentation du dossier - Sandra Travers de Faultrier p. 183-189
Chronique
- Quelle(s) justice(s) pour le sport international ? - Mathieu Maisonneuve p. 267-279 Le règlement des litiges sportifs internationaux est par nature au cœur d'un conflit de justices entre, d'un côté, la justice sportive, et, de l'autre côté, la justice publique. Avec l'avènement du Tribunal arbitral du sport (TAS), un pluralisme judiciaire ordonné s'est progressivement dessiné : à la justice sportive fédérale, le prérèglement des litiges nés de l'exercice de la puissance sportive ; au TAS, leur règlement juridictionnel en appel ; au Tribunal fédéral suisse, le contrôle restreint des sentences rendues. Sans remettre fondamentalement en cause cette répartition des rôles, censée être à la fois respectueuse de l'autonomie du Mouvement sportif, du principe d'égalité des athlètes devant la justice et du droit au juge, de récentes décisions des juridictions européennes sont toutefois en passe de la faire évoluer. Avec son arrêt Mutu et Pechstein de 2018, et peut-être plus encore avec son arrêt Semenya de 2023, la Cour européenne des droits de l'homme entend s'assurer que le Tribunal fédéral suisse, et par ricochet le TAS, veillent bien au respect des droits garantis par la Convention européenne des droits de l'homme. Avec son arrêt International Skating Union, du 21 décembre 2023, la Cour de justice de l'Union européenne invite les juridictions des États membres à priver d'effet les clauses TAS lorsque sont portés devant elles des litiges impliquant le respect de l'ordre public de l'Union. Autrement dit, si la compétence principale de la justice sportive pour juger de la légalité des décisions des institutions sportives n'est pas directement menacée, la compétence subsidiaire de la justice publique est en voie d'élargissement.The settlement of international sporting disputes is, by its very nature, at the center of a judicial conflict between, on the one hand, sporting justice and, on the other, state justice. Since the creation of the Court of Arbitration for Sport (CAS), an organized pluralism of judicial bodies has gradually emerged. Federal sports justice is responsible for the pre-settlement of disputes arising from the exercise of sporting power ; their adjudication on appeal is assigned to CAS ; finally, the Swiss Federal Tribunal exercises limited control over these awards. Recent decisions by European courts do not fundamentally challenge this division of roles, which is supposed to respect the autonomy of the sports movement, the principle of equality of athletes before the law and the right to a judge, but they are nevertheless likely to alter it. With its Mutu and Pechstein ruling of 2018, and perhaps even more so with its Semenya ruling of 2023, the European Court of Human Rights is committed to ensuring that the Swiss Federal Tribunal, and by indirect implication CAS, uphold the rights guaranteed by the European Convention on Human Rights. In its International Skating Union judgment of December 21, 2023, the European Court of Justice instructed the Member States'courts to deprive CAS clauses of effect when disputes involving respect for the Union's public policy were brought before them. In other words, while the primary competence of sports justice to judge the legality of decisions taken by sporting institutions is not directly threatened, the subsidiary competence of state justice is on the path to being extended.
- Lutte contre la corruption en France : bilan et perspectives - Chantal Cutajar p. 283-293 Résumé« Lutter contre la corruption est un impératif catégorique que nul ne remet plus en question. Cependant, des paroles aux actes, le chemin est long et semé d'embuches. L'efficacité de la lutte contre la corruption nécessite d'agir dans trois domaines indissociables que sont la prévention, la détection et la répression. En France, des progrès notables sont intervenus dans le prolongement de l'« affaire Cahuzac » qui a institué des nouveaux acteurs et créé des outils dédiés. Mais nous sommes encore au milieu du gué, comme si l'on ne parvenait pas à prendre la mesure réelle des effets dévastateurs de la corruption, dont il est avéré qu'elle met en danger la démocratie elle-même. Les réponses existent pour améliorer aussi bien la détection que la répression. »“Fighting corruption is a categorical imperative that is no longer questioned. However, the road from words to action is long and full of pitfalls. If the fight against corruption is to be effective, action must be taken in three inseparable areas: prevention, detection and repression. In France, significant progress was made in the wake of the “Cahuzac affair”, which introduced new players and created specific tools. But we are still stuck halfway, as if we have failed to grasp the full extent of the devastating effects of corruption, which is now a proven threat to democracy itself. There are answers to improving both detection and repression.”
- Justice et démocratie, appuis du citoyen - Jean-Louis Gillet p. 295-298 Justice et démocratie, concepts positifs et recherchés, nourrissent l'une à l'égard de l'autre des apports de garantie et d'encadrement et des menaces réciproques de fragilisation et de dévoiement. Elles craignent et espèrent dans le citoyen.Justice and democracy, both positive and sought-after concepts, provide each other with guarantees and guidance, and mutual threats of being undermined and led astray. They have both fear and hope in the citizen.
- Violence du crime, violence de la société : À propos de Paul Fauconnet, La Responsabilité. Étude de sociologie (1920), présentation et édition de Sacha Lévy-Bruhl, coll. Quadrige, PUF, 2023 - Denis Salas p. 301-307 L'essai de Paul Fauconnet « La Responsabilité. Étude de sociologie », publié en 1920, éclaire les types de violences qui se croisent dans le champ pénal, celle du crime et celle de la société. Ce qu'il appelle, en sociologue durkheimien, la « responsabilité » est la réaction violente de la société contre tous ceux qui offensent les « états forts de la conscience collective ». Cette imputation est cependant modérée dans les sociétés modernes où « la personne humaine est sacrée » ce qui génère un adoucissement des peines. Une telle tension entre ces « deux sources de la responsabilité dont l'une (objective) est dans le crime, l'autre (subjective) dans l'individu », demeure constitutive du droit pénal moderne.Paul Fauconnet's essay, “La Responsabilité. Étude de sociologie”, published in 1920, sheds light on the types of violence that intersect in the fields of criminal justice, crime and society. As a Durkheimian sociologist, he refers to “responsibility” as society's violent reaction against all those who offend the “strong states of the collective conscience”. This responsibility is, however, moderated in modern societies where “the human person is sacred”, leading to a softening of penalties. The tension between these “two sources of responsibility, one of which (objective) is in the crime, the other (subjective) in the individual”, remains at the heart of modern criminal law.
- Pour la non-punition des erreurs au sein de la magistrature - Manuel Carius p. 311-324 Depuis une trentaine d'années, des secteurs confrontés à des risques importants, tels l'aéronautique et l'hôpital, ont développé des outils de management pour renforcer la connaissance des « événements indésirables » et éviter leur répétition. C'est ainsi qu'un principe dit « de non-punition » a été élaboré, selon lequel une institution s'engage à ne pas sanctionner les erreurs involontaires, à condition qu'elles aient donné lieu à une remontée d'informations. Il s'agit là de lutter contre le mutisme qui enveloppe souvent les incidents causés par des défaillances humaines. Appliquer le principe de non-punition à la justice, dans un souci d'amélioration et d'anticipation des risques, est possible et même souhaitable.Over the last thirty years or so, sectors faced with major risks, such as aeronautics and hospitals, have developed management tools to improve awareness of “undesirable events” and prevent their recurrence. This has led to the development of a principle of “non-punishment”, under which an institution undertakes not to punish unintentional errors, provided they are reported. The aim is to combat the silence that often surrounds incidents caused through human error. Applying the principle of non-punishment to the justice system, with a view to mitigating and anticipating risks, is possible and even desirable.
- Quelle(s) justice(s) pour le sport international ? - Mathieu Maisonneuve p. 267-279
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- Le procès Pétain revisité : Le procès Pétain de Julian Jackson, Seuil, 2024, France on Trial. The case of Marshal Pétain, traduit de l'anglais par Marie-Anne de Béru, 480 p. - Jean-Paul Jean p. 325-328
- Écrire la parole : À propos de Peines mineures de Sonia Chiambretto - Sandra Travers de Faultrier p. 329-330 Œuvre chorale qui parvient à écrire la parole, Peines mineures donne voix à celles qui s'excluent tout autant qu'on les exclut. Là où les éclats de vie disent, à travers la langue orpheline des unes et des autres, une incompréhension nourrie de mots.On Peines Mineures by Sonia Chiambretto
An ensemble work that puts voices down on paper, Peines Mineures gives a voice to those who exclude themselves as much as they are excluded. Where bursts of life use an orphaned language to speak of a misunderstanding nourished by words. - Le Déni du viol. Essai de justice narrative, Denis Salas - Sandra Travers de Faultrier p. 331-335 L'énergie narrative de la littérature déborde les genres comme les disciplines. Et quand elle se met au service d'un procès du langage elle crée un espace nouveau où l'arrière-plan idéologique jusque-là tout puissant cède. Voir, entendre naissent de ces récits fictionnels ou de témoignages que Denis Salas mobilise dans le récit historique et juridique qu'il déploie avec le souci de reconnaître le rôle déterminant de ce hors-droit dans l'avancée du droit.The narrative energy of literature transcends both genres and disciplines. And when it is placed at the service of a linguistic process, it creates a new space where the formerly all-powerful ideological background yields. Seeing and hearing are born of these fictional narratives or testimonies that Denis Salas uses in his historical and legal narrative, which he develops with a view to recognising the decisive role played by those outside the law in the advancement of the law.