Contenu du sommaire : Enseignements
Revue | Cahiers d'études africaines |
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Numéro | no 169-170, 2003 |
Titre du numéro | Enseignements |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Vers de nouvelles recherches en éducation - Marie-France Lange p. 7-17
Changement sociétaux et évolution de l'école
- Les écoles spontanées en Afrique subsaharienne : Champ éducatif et contre-champ scolaire - Jean-Yves Martin p. 19-40 Des écoles spontanées sont apparues dans différents pays d'Afrique subsaharienne (en particulier Tchad, Mali, Cameroun) au cours des vingt dernières années. Cet article présente une analyse de ce phénomène et en propose une interprétation. Ces écoles spontanées sont replacées dans le cadre historique et politique des modalités de construction et de développement des systèmes scolaires, en passant de la colonisation aux éducations nationales. Sont ensuite analysées les identités variées des écoles spontanées à travers leurs contextes d'apparition, la nature de la demande qui les a fait naître, le cadre des connaissances transmises, le panorama scolaire où elles s'insèrent et enfin leur statut juridique et l'évolution recherchée. Enfin, à travers la notion de contre-champ scolaire, les écoles spontanées sont interprétées comme une étape nécessaire d'appropriation permettant la maîtrise des enjeux scolaires dans la reproduction des sociétés concernées.
- Un siècle d'éducation scolaire en Tanzanie - Nathalie Bonini p. 40-62 Cet article se propose de retracer l'évolution de l'École en Tanzanie depuis la colonisation qui marque l'apparition de la scolarisation sur le modèle occidental dans cette région. Faiblement et tardivement développée à cette époque, cette scolarisation apparaît essentielle pour le nouveau gouvernement indépendant. Après une période de flottement de quelques années, le président tanzanien J. K. Nyerere opte pour une politique éducative particulière devant amener les individus à développer le pays en améliorant la production agricole et en propageant les idées et pratiques socialistes. N'étant plus uniquement centrée sur les besoins économiques, elle est désormais perçue comme un outil de transformation radicale de la société en communauté socialiste et autosuffisante. Cette politique, qui n'a pas atteint ses objectifs, fut abandonnée au milieu des années 1980 au profit de modèles éducatifs plus en phase avec les orientations des institutions internationales comme la Banque Mondiale qui, depuis ces années, participent à la gestion de l'École dans ce pays.
- La démocratisation de l'enseignement au Burkina Faso : que peut-on en dire aujourd'hui ? - Marc Pilon, Madeleine Wayack p. 63-86 L'article explore les possibilités qu'offrent les différentes sources de données existantes (statistiques scolaires, recensements, enquêtes) pour aborder la question de la démocratisation de l'enseignement dans le contexte de l'Afrique subsaharienne, plus particulièrement du Burkina Faso, où l'accès à l'École reste le problème majeur. Dans la limite des informations disponibles pour chacun des niveaux d'enseignement, du primaire au supérieur, elle est conduite en référence aux inégalités liées au sexe des élèves ainsi qu'à leur origine géographique et sociale, au cours des trente dernières années. Les auteurs mettent en lumière les insuffisances des statistiques scolaires sur l'origine sociale des élèves et les limites des données d'enquête et de recensement. Les résultats obtenus révèlent une certaine réduction des inégalités géographiques, la faible amélioration de la scolarisation des filles et un processus de sélectivité sociale croissante du système éducatif.
- La refondation de l'enseignement catholique au Burkina Faso - Maxime Compaoré p. 87-98 Cet article traite de la refondation de l'enseignement catholique engagée depuis les années 1990 au Burkina Faso. Après 30 ans d'absence dans le domaine de l'enseignement primaire, l'Église catholique se repositionne dans le système éducatif burkinabè et se réorganise dans la perspective d'un nouveau départ. L'auteur s'appuie sur les textes fondamentaux de l'éducation au Burkina Faso et de l'enseignement catholique. Il s'intéresse ensuite à l'étude des stratégies de mise en oeuvre, qui passe par des consultations au niveau des structures de base de l'Église catholique, une réflexion au plan national et des négociations avec, d'une part, l'État et, d'autre part, les autres acteurs du système éducatif. L'étude débouche sur une analyse des réalités actuelles de l'enseignement primaire catholique au Burkina Faso. C'est donc l'analyse des fondements de ce retour de l'Église catholique dans l'enseignement primaire qui constitue l'essentiel de cet article.
- « Le temps des missionnaires n'est plus ! » : Le devenir postcolonial de l'enseignement catholique en Côte-d'Ivoire (1958-2000) - Éric Lanoue p. 99-120 À l'inverse d'autres pays africains où elles disparurent au moment des indépendances, voire après, les écoles confessionnelles (principalement catholiques) trouvèrent en Côte-d'Ivoire une place de choix au sein du système scolaire public. Divers facteurs expliquent la dynamique d'intégration nationale ici décrite et interrogée, entre autres, du côté de l'État, la politique religieuse du président Houphouët-Boigny (consécration des missionnaires) et, du côté de l'Église, le souhait des évêques ivoiriens de sauvegarder un réseau d'écoles contre l'avis de certains missionnaires occidentaux (convention scolaire de 1974). Ce détour par l'histoire, construit à partir d'une périodisation originale, contribue à éclairer les enjeux d'une tendance actuelle, celle d'un devenir-privé des écoles confessionnelles, à l'origine de nouvelles luttes opposant d'une part l'Église et les dirigeants politiques ivoiriens, et d'autre part les nouveaux acteurs émergents de l'enseignement catholique (parents d'élèves, syndicats) et l'Église. L'article montre comment, selon des contextes, des tendances plurielles, parfois opposées, modifient le cadre et le contenu des échanges entre les acteurs publics et privés investis dans le devenir des écoles confessionnelles.
- L'école comme centre de la vie communautaire : Diversification des représentations et des pratiques dans une communauté semi-rurale d'Afrique du Sud - Ingrid Bamberg p. 121-141 En Afrique du Sud, le système éducatif décentralisé permet désormais aux acteurs locaux de l'éducation de participer aux prises de décision à travers des comités de gestion élus et composés d'enseignants et de membres de la communauté, les parents. Pour les concepteurs de la politique éducative, ces comités constituent le lien indispensable entre l'école et la communauté ainsi qu'un moyen privilégié de faire de l'école un « centre de la vie communautaire » une priorité gouvernementale depuis la fin des années 1990. Les stratégies éducatives des parents d'une communauté semi-rurale nous montrent comment les décisions de ces comités de gestion en matière de frais de scolarité et de langue d'enseignement modèlent l'offre scolaire et influencent le cadre d'interaction possible entre l'école et la communauté. Elles nous révèlent également les limites de l'idée d'école comme « centre de la vie communautaire » et invitent à nous interroger sur le concept de communauté lorsqu'il est appliqué à la politique éducative d'une Afrique du Sud encore fortement imprégnée des conceptions communautaristes de la vie sociale imposées par l'apartheid, mais où les relations entre individus et groupes sont également articulées par de nouvelles dynamiques spatiales et sociales.
- Les écoles spontanées en Afrique subsaharienne : Champ éducatif et contre-champ scolaire - Jean-Yves Martin p. 19-40
L'école entre mondialisation et crises politiques
- École et mondialisation Vers un nouvel ordre scolaire ? - Marie-France Lange p. 143-166 L'évolution récente des systèmes éducatifs africains s'inscrit au sein d'un mouvement impulsé à la fois par des politiques de mondialisation et par des dynamiques sociales promues par les sociétés civiles. Le rôle des conférences et des aides financières internationales, perçues comme véhicules des politiques de mondialisation, est interrogé. L'analyse des expressions de la demande scolaire, des représentations sociales de l'École, de la relation famille-École incite à relativiser le processus d'imposition de normes internationales. Le nouvel ordre scolaire mondial se construit en juxtaposition de dynamiques sociales qui réinterprètent, contournent et travestissent l'idéologie dominante. La tendance à l'uniformisation des systèmes et le triomphe de l'idéologie scolaire se heurtent à la production et à la reproduction de normes sociales et culturelles autonomes.
- Quel financement pour l'École en Afrique ? - Nolwen Henaff p. 167-188 Malgré des efforts importants depuis les indépendances, les progrès de la scolarisation ont été jugés insuffisants. C'est pourquoi la plupart des pays du monde ont réaffirmé leur engagement pour le développement de « l'Éducation pour tous » à Jomtien en 1990, puis renforcé leurs objectifs à Dakar en 2000. Les estimations des besoins de financement requis pour atteindre ces objectifs varient, mais montrent qu'ils sont très importants. Étant donnés les efforts déjà réalisés au cours des années 1990, il semble qu'il faille s'appuyer à l'avenir davantage sur une amélioration de la maîtrise des dépenses que sur une réduction supplémentaire des coûts pour dégager des ressources supplémentaires. Le secteur privé a une faible capacité de mobilisation de fonds, et les résultats de la décentralisation sont peu probants. Les marges de man?uvre des États africains sont donc restreintes. Par ailleurs, le volume de l'aide publique au développement se réduit ainsi que la part de l'Afrique dans cette aide, et l'aide allouée à l'éducation n'a que très faiblement augmenté au cours des années 1990 malgré les engagements pris par les bailleurs de fonds lors de différents sommets internationaux. On peut se demander si les objectifs fixés pour les États d'Afrique ne sont pas volontairement hors d'atteinte, ce qui permettrait de justifier ex-post une évolution de l'aide inadéquate, en en faisant porter aux États la responsabilité.
- La débâcle éducative du Kenya : Éléments d'analyse historique - Hélène Charton p. 189-208 Le taux de scolarisation primaire du Kenya ? longtemps pays modèle en matière d'éducation ?, est passé de 95 % en 1988 à 79 % en 2000. Ce phénomène de déscolarisation qui se double de violences et de grèves inédites, nous invite à nous interroger sur les facteurs historiques qui ont précipité le déclin de l'institution scolaire du Kenya. À l'époque coloniale, la soif d'éducation des populations africaines s'est exprimée à travers des formes originales de mobilisation populaire. À l'indépendance du Kenya en 1963, l'École a joué un rôle fédérateur et structurant dans l'émergence de la nation kenyane. Les initiatives populaires ont, en effet, été encouragées et institutionnalisées par les responsables de la jeune république qui a alors connu une scolarisation rapide et massive. Mais depuis dix ans, les difficultés économiques du pays et le désengagement manifeste du pouvoir politique ont rompu cette dynamique. La société civile a perdu confiance dans un système scolaire ruineux et corrompu. La violence de la crise que traversent aujourd'hui les institutions scolaires du Kenya est alors à l'image de l'ampleur de la déception d'une population qui s'est beaucoup investie dans l'éducation de ses enfants.
- Classement et déclassement des universités au Nigeria : De l'uniformité des procédures d'admission à la multiplicité des stratégies de contournement - Yann Lebeau p. 209-233 Partant d'une critique des lectures comparatives et continentales des transformations en cours des systèmes d'enseignement supérieur en Afrique, cet article tente de restituer la situation actuelle des universités du Nigeria dans une trajectoire historique nationale spécifique. En particulier, il s'intéresse à la genèse des tensions observées entre une demande sociale diverse et un système d'enseignement supérieur uniforme depuis les années 1970. Ces tensions sont aujourd'hui au coeur de polémiques et d'initiatives décrites dans l'article, qui traduisent, selon l'auteur, autant l'acuité des enjeux sociaux, géo-ethniques et politiques nationaux autour de l'enseignement supérieur, qu'une « adaptation » aux exigences de la mondialisation.
- École et mondialisation Vers un nouvel ordre scolaire ? - Marie-France Lange p. 143-166
Hors de l'école : enseignement religieux, apprentissage, travail
- « Une pédagogie coranique » Modes de transmission des savoirs islamiques (Mauritanie) - Corinne Fortier p. 235-260 Deux niveaux d'enseignement principaux des savoirs islamiques peuvent être distingués dans la société maure comme dans la plupart des sociétés musulmanes. Un premier niveau se caractérise par une certaine progression dans l'apprentissage du Coran et une mobilité spatiale dont la planchette (lawh), support de cet enseignement, rend compte. À un niveau d'enseignement plus élevé, dans une mahâzra, l'élève, selon la région, est amené à approfondir soit l'apprentissage du Coran, soit celui d'une discipline déterminée, ou de plusieurs (droit, grammaire...). Le corpus des textes qui est enseigné est commun aux autres pays de rite malékite, à l'exception de certaines gloses de ces textes, écrits en vers par des lettrés locaux pour en faciliter la compréhension et la mémorisation. Des procédés mnémoniques de type oral sont également utilisés pour enseigner les savoirs non coraniques, et ce, aussi bien à la mahâzra que dans le cadre familial, par les hommes comme par les femmes, selon le type des savoirs transmis (poésie, hadith...). En revanche, le seul mode d'apprentissage adapté au texte coranique procède d'une mémorisation par coeur. En effet, le Coran étant considéré par les musulmans comme la parole même de Dieu, sa récitation, bien plus valorisée que son écriture, se doit d'être irréprochable. Ainsi, c'est le statut incomparable de ce texte relativement aux autres qui explique que, dans la plupart des sociétés musulmanes, on retrouve une même « pédagogie coranique » distincte des modes de transmission des autres savoirs.
- L'enseignement islamique en Afrique noire - Stefania Gandolfi p. 261-278 Qu'est-ce que l'enseignement islamique ? Cet article tente d'amorcer une réponse à cette question en analysant d'abord les particularités de l'islam noir dans lequel s'inscrit l'enseignement islamique et en effectuant ensuite une typologie des différentes formes de cet enseignement, selon sa localisation dans les pays d'Afrique noire et selon son fonctionnement. Suite à une analyse du système cognitif, des fonctions culturelles, du statut social, puis des aspects pédagogiques et sociologiques, l'auteur essaie d'identifier la place que l'enseignement islamique occupe dans les politiques nationales d'éducation. Elle tente de mesurer l'impact de cet enseignement, et, en particulier, pose la question de sa contribution à la généralisation de l'éducation de base au sein des pays d'Afrique noire.
- Une sélection insidieuse. Les savoirs scolaires dans l'apprentissage à Bamako - Bénédicte Kail p. 279-298 L'étude de différents moments-clés de l'apprentissage, comme le choix du métier, l'acquisition des savoirs professionnels ou les possibilités d'évolution pendant et après l'apprentissage, et la comparaison entre des jeunes qui ont bénéficié de scolarités différentes, et cela dans cinq corps de métiers se situant à Bamako, permet d'analyser comment les savoirs scolaires interviennent dans l'apprentissage. Cet article montre en quoi les savoirs scolaires constituent à la fois un capital culturel permettant au jeune d'aller plus vite et plus loin dans les processus d'apprentissage, un capital social le rendant moins dépendant du réseau familial et, surtout, un capital symbolique l'autorisant à envisager de s'installer ou à bénéficier de formations extérieures. Les savoirs scolaires constituent ainsi une sélection d'autant plus insidieuse qu'elle n'est jamais présentée comme telle par les acteurs du système.
- Les travers du savoir. Représentations du diplôme et du travail au Maroc - Étienne Gérard, Bernard Schlemmer p. 299-320 À l'instar de nombreux pays, le Maroc doit faire face aujourd'hui au « chômage intellectuel » de ses diplômés sortis de l'université, voire des écoles d'ingénieurs. Cette situation donne lieu à l'interprétation courante, tant de la part des acteurs politiques que des médias, de « l'inadéquation entre formation et emploi ». Elle pose aussi, et plus profondément, la question de l'articulation entre savoir et travail. À travers l'examen successif de la construction historique de l'université marocaine, puis des représentations du diplôme par les lauréats de l'enseignement supérieur, issus du milieu populaire, enfin de leurs pratiques d'intégration, cet article montre que, après avoir été au centre du principe d'acquisition du capital social et économique, le savoir et le titre préludent aujourd'hui au déclassement. Ils génèrent en outre la conquête de positions dans sa classe, dominée, d'appartenance ? plutôt que de chercher à accéder à la classe supérieure ?, ou la décision de s'exiler à l'étranger. En conclusion, cet article avance l'hypothèse que le savoir universitaire pourrait sédimenter un « contre-champ » social, en marge de l'élite et du champ politique.
- Religieux et profane dans l'École coranique : Le cas de l'Afrique orientale et de l'océan Indien occidental - Jean-Claude Penrad p. 321-335 L'École coranique n'est pas l'institution figée souvent décrite. Il convient de la situer dans le temps et les espaces, de la saisir sous l'éclairage des cultures et dans les processus sociopolitiques qui la contraignent. longtemps réservée à l'élite politique et sociale des cités insulaires et côtières, l'éducation religieuse s'est démocratisée lors de l'expansion continentale de l'islam à partir du XIXe siècle. Les réponses communautaires, notamment parmi les originaires du sous-continent indien, ont souvent associé l'enseignement coranique à l'éducation profane. Selon les pays de la zone, d'autres réponses ont été esquissées pendant la période coloniale avant que les associations nationales de musulmans instituées dans les nouveaux États ne s'engagent sur la question en tenant compte de la marginalisation croissante des musulmans. Les dynamiques à l'oeuvre doivent être reliées aux processus d'intégration nationale et internationale comme l'atteste l'intervention croissante des fondations islamiques qui s'impliquent pour mêler les deux types d'éducation.
- « Une pédagogie coranique » Modes de transmission des savoirs islamiques (Mauritanie) - Corinne Fortier p. 235-260
École et guerres civiles
- Les collégiens et la guerre au Congo - Suzie Guth p. 337-350 Vingt-six jeunes gens d'un établissement privé catholique de Pointe-Noire racontent leur fuite et leur parcours durant les guerres civiles congolaises. Ils cherchent à prendre leurs distances avec les situations tragiques qu'ils ont connues mais, en même temps, les émotions les submergent et les actes de barbarie les anéantissent. Ils ont fait l'expérience du dénuement, alors que leurs familles sont plus aisées que la moyenne, mais aussi celle de la fragilité et de la fin de la vie humaine. La gratuité de certains actes les conduit à mettre en cause la réalité et le sens. La plupart ont trouvé refuge dans une conduite méthodique de la prière : le sacré permet non seulement de rythmer une vie d'errance (la plupart sont venus de Brazzaville jusqu'à Pointe-Noire), mais aussi d'appréhender un monde transcendant. La guerre conduit ces jeunes collégiens à l'expérience métaphysique et ontologique, à une réflexion sur la condition humaine et à la recherche de la rédemption par l'intercession auprès du divin.
- Retour vers les dugsi, écoles coraniques en Somalie - Mohamed Mohamed-Abdi p. 351-369 Cet article traite de l'évolution de l'enseignement pratiqué en Somalie au cours du XXe siècle (périodes précoloniale, coloniale, gouvernements civil et militaire, guerre civile). Il décrit en particulier le fonctionnement des écoles coraniques et leur importance dans le système éducatif somali traditionnel. Malgré le développement des écoles la ïques, les dugsi se sont maintenues ou ont évolué vers des écoles madrasa (enseignement la ïc et religieux). Après l'éclatement de la guerre civile, elles ont continué de fonctionner et d'assurer leur rôle éducatif auprès des enfants.
- Les collégiens et la guerre au Congo - Suzie Guth p. 337-350
L'école coloniale : stratégies éducatives et politiques scolaires
- La formation des Africaines à l'École normale d'institutrices de l'AOF de 1938 à 1958 : Instruction ou Éducation ? - Pascale Barthélémy p. 371-388 En 1938, une École normale d'institutrices ouvre ses portes à Rufisque, au Sénégal. Cette institution, qui recrute des jeunes filles dans tous les territoires d'Afrique occidentale française, a un double objectif. Celui de former les premières enseignantes africaines et celui d'éduquer les futures épouses des auxiliaires masculins diplômés des écoles supérieures existantes. Les enjeux politiques et idéologiques qui déterminent la fondation de cet établissement relèvent moins d'un souci de favoriser l'épanouissement des jeunes femmes concernées que de leur inculquer des valeurs et des comportements susceptibles d'ancrer davantage la présence française dans les colonies. Dans le but de créer des ménagères accomplies et de bonnes mères de famille, la première directrice de l'école, Germaine Le Goff, conformément aux instructions officielles, met en place une éducation morale et pratique très complète, parallèlement à une instruction générale de base et à quelques leçons de pédagogie. Par un certain nombre d'aspects, les principes éducatifs qui régissent la vie à l'école sont comparables à ceux qui dominaient dans les établissements d'enseignement secondaire féminin en métropole à la fin du XIXe siècle. Néanmoins, la création de cet établissement constitue une étape essentielle dans un processus de professionnalisation des femmes entamé en Afrique de l'Ouest francophone au lendemain de la Première Guerre mondiale. L'ouverture en 1918 d'une section « sages-femmes » au sein de l'École de médecine puis l'institutionnalisation d'une formation d'infirmières-visiteuses à partir de 1930 furent les premières initiatives en la matière. L'École normale de Rufisque fut en quelque sorte l'apogée de ce que l'administration française a entrepris en Afrique en faveur de l'éducation des filles.
- Les stratégies scolaires au Togo à l'époque du mandat français : Le cours complÉmentaire de LomÉ et la formation des Élites modernes - Yves Marguerat p. 389-408 Sur le littoral togolais, l'École a été perçue dès le milieu du XIXe siècle comme le meilleur moyen de promotion sociale. Alors que les Allemands refusaient toute scolarisation au-delà du primaire, les Français voulaient des auxiliaires formés selon leur modèle. Ils ouvrirent un cours complémentaire à Lomé en 1922, qui devint la voie royale de la promotion pour la plupart des futurs cadres du pays, en particulier les médecins. Grâce à leur « privilège culturel », les enfants du littoral ont été largement majoritaires : ils représentent les deux-tiers des 343 élèves formés en 22 ans. Cependant, les notables de Lomé (surtout orientés vers le commerce et la langue anglaise) préférèrent envoyer leurs enfants en Gold Coast. Ce clivage se retrouvera dans les luttes politiques des années 1950-1960 : malgré d'innombrables chassés-croisés, les partisans de la rupture avec la France étaient plutôt des employés de commerce de formation anglaise, les partisans d'une autonomie progressive plutôt des fonctionnaires sortis de l'École française. Les enfants venus du Nord du Togo (12 seulement) n'apparaissent qu'en 1930 ; de même les filles (16, surtout issues des bonnes familles de la côte) à partir de 1935.
- Histoire de bancs, parcours d'élèves : Pour une lecture "configurationnelle" de la scolarisation à l'époque coloniale - Jean-Hervé Jézéquel p. 409-433 Cet article s'intéresse aux logiques qui président à la diffusion de l'École en Afrique de l'Ouest. Il souligne d'abord les limites des interprétations univoques et linéaires du processus de scolarisation à l'époque coloniale. À partir d'une étude prosopographique centrée sur les diplômés de l'École Normale William-Ponty, il propose ensuite une approche plus attentive aux interprétations et aux appropriations différenciées de l'École par les sociétés locales. En effet, au temps colonial, l'École n'a pas encore acquis l'épaisseur d'un « fait social » auquel seraient liées des pratiques collectives déjà bien définies et partagées. Dès lors, il est nécessaire de développer une lecture historique attentive à l'impact différencié des facteurs de scolarisation en fonction des « configurations » dans lesquelles ils s'insèrent. Cet article montre finalement que dans la première moitié du XXe siècle, les itinéraires de scolarisation obéissent à des logiques complexes, fragiles et discontinues qui expliquent, par la suite, la grande diversité de l'élite lettrée ouest-africaine.
- La formation des Africaines à l'École normale d'institutrices de l'AOF de 1938 à 1958 : Instruction ou Éducation ? - Pascale Barthélémy p. 371-388
Chronique bibliographique
- Analyses et comptes rendus - p. 435-452