Contenu du sommaire : A quoi sert la sociologie de l'éducation ?
Revue | Education et sociétés |
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Numéro | no 9, 2002 |
Titre du numéro | A quoi sert la sociologie de l'éducation ? |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- La circulation des savoirs entre sociologie de l'éducation et société : Présentation - Patrick Rayou p. 5-11 La question de l'utilité sociale de la sociologie de l'éducation ne peut recevoir de réponse satisfaisante dans le cadre d'une vision applicationniste qui la verrait tenter d'imposer aux profanes ses concepts, ses méthodes et ses résultats. Ceux-ci sont, en effet, désormais membres de sociétés critiques dans lesquelles leur réflexivité se nourrit autant de savoirs savants sur le social que leurs propres catégories d'acteurs imprègnent les analyses des sociologues. Il vaut mieux alors aborder les savoirs sociologiques en tentant de suivre les chemins qu'ils empruntent et les inflexions qu'ils subissent au cours de leurs circulations entre différents mondes. C'est ce que tente de faire ce dossier en appliquant aux savoirs sociologiques eux-mêmes une analyse qui voit en eux des construits sociaux différemment mobilisés dans l'expertise et l'action sur l'école comme dans la formation des maîtres.The Circulation of Knowledge between the Sociology of Education and Society. The question of the social usefulness of the sociology of education cannot be given a satisfactory reply when considered in the framework of a perspective which, in seeking its application, would attempt to impose its concepts, methods and findings on the layman. The uninitiated layman is now indeed a member of a critical society in which his reflexiveness is fed as much on academic knowledge about social matters just as his own particular role permeates the analysis of sociologists. It would thus be better to approach sociological knowledge by attempting to follow the paths which it takes itself and the inflexions it undergoes in the course of its movement between different spheres. This is what this dossier seeks to do by applying an analysis to sociological knowledge itself to show how the social constructions within it are differently mobilized as to action in schools and expertise, such as in the case of teacher-training.
- Pourquoi ne croit-on pas les sociologues ? - François Dubet p. 13-25 On peut distinguer trois grands types de raison et de motifs expliquant que les enseignants, pourtant très informés, ne croient pas véritablement aux conclusions de la recherche en sociologie de l'éducation. Il existe d'abord des explications tenant à la position des individus dans le système, position qui conduit à démentir des conclusions établies sur de grands ensembles. Ensuite, les acteurs ont du mal à admettre les résultats de recherches qui contredisent directement les croyances nécessaires à l'accomplissement même de leur travail. Ce n'est enfin qu'à la marge que l'on trouvera de véritables intérêts à l'origine du refus des résultats de la recherche.Why don't we believe Sociologists?
Three main kinds of reasons and motives can be distinguished to explain why teachers, however well-informed they are, do not truly believe in the findings of research in sociology. First of all, there are explanations which are rooted in the positions of individuals in the system, positions which lead them to deny the findings concerning wide-ranging general studies. Moreover, people involved in education have difficulty accepting research findings which directly contradict the beliefs they must necessarily have in order to carry out their work. It's finally on the fringes that are found the real interests which explain the refusal of research findings. - La production des connaissances sociologiques et leur appropriation par les acteurs - Danilo Martuccelli p. 27-38 L'article se centre sur deux cas de figures problématiques de la relation entre le savoir sociologique et l'action sociale, en la replaçant dans le mouvement général de la sociologie de l'éducation et sa vocation à s'intéresser de près au fonctionnement de la “boîte noire”. On distinguera d'une part, des connaissances sociologiques qui, dans la situation actuelle, ne doivent pas, paradoxalement, orienter l'action et d'autre part, des connaissances qui, à l'inverse, ne peuvent pas la nourrir.The Production of Sociological Knowledge and how it is appropriated
This article focuses on two problematical issues concerning the relation between socio-logical knowledge and social action, by placing the relation in the general movement of the sociology of education and its vocation to examine attentively the functioning of the black box. A distinction will be made, on the one hand, between sociological knowledge which in the present day context mustn't, paradoxically, orientate action, and, on the other hand, knowledge which inversely cannot sustain it. - La mobilisation stratégique et politique des savoirs sur le social : le cas des parents d'élèves des classes moyennes - Agnès van Zanten p. 39-52 Cet article s'intéresse à la mobilisation des savoirs sur le social dans les stratégies individuelles et la décision politique en éducation à partir de l'exemple du choix de l'établissement par les parents d'élèves des classes moyennes. Il examine dans un premier temps les critères utilisés par les parents pour classer les établissements scolaires et les procédures utilisées pour obtenir des informations en cernant la nature des emprunts aux modèles sociologiques. Dans un deuxième temps, il analyse la façon dont les raisonnements socio-logiques interviennent dans l'analyse des causes de dysfonctionnement des établissements et dans la construction des propositions d'action par ces catégories sociales. Il conclut en soulignant les interactions entre les sociologues, les parents et les politiques dans l'évolution de l'action publique en éducation.The Strategic and Political Mobilization of Knowledge in Social Matters.
The case of Pupils with Middle-Class Parents This article focuses on the mobilization of knowledge in social matters in individual strategies and policy decisions in education from the example of how middle-class parents choose a school for their children. It first of all examines the criteria which parents use to class schools and the procedures used to gather information, and defines, in doing so the nature of what is borrowed from sociological models. In a second part, the article investigates the way sociological reasoning comes into play in the analysis of the causes of poor performing schools and in the construction of propositions for action by those social categories. It concludes by highlighting the interaction between sociologists, parents and politicians in the development of state intervention in education. - La place de l'enseignement de la sociologie de l'éducation dans les programmes de formation des enseignants au Québec : étude de cas inspirée d'une sociologie du curriculum - Claude Trottier, Claude Lessard p. 53-71 Une des façons d'aborder la circulation des savoirs entre la sociologie de l'éducation et la société est d'examiner jusqu'où elle a pénétré l'univers des enseignants et, plus spécifiquement, les programmes de formation des enseignants. L'objectif de cet article est de reconstituer la place qu'elle occupe dans ces programmes à partir d'une étude de cas portant sur les programmes de formation des enseignants au Québec. Après avoir posé le problème en s'inspirant d'une sociologie du curriculum, dressé un portrait de cet enseignement dans ces programmes et montré que la sociologie de l'éducation y occupe une place marginale, les auteurs proposent une interprétation du statut peu élevé dont cette discipline bénéficie dans la stratification des diverses matières qui y sont enseignées.The Place held by Courses on the Sociology of Education in Teacher-Training Colleges in Quebec. A Case Study inspired from a Sociological study of the Curriculum One of the ways in which to approach the circulation of knowledge between the sociology of education and society as a whole is to examine to what extent it has penetrated into the teaching world, and more particularly, the programmes of Teacher Training Colleges. The goal of this article is to reconstitute the place the circulation of knowledge occupies in these programmes from a case study dealing with the teacher training programmes in Quebec. After having posed the problem, drawing their inspiration from a sociological study of curriculum, presented a portrait of this teaching in these programmes and showing that the sociology of education is of marginal importance, the authors propose an interpretation of the low status in which this discipline is held in the hierarchy of subjects which are taught.
- Les usages du savoir sociologique dans un contexte de formation. Le cas des formateurs d'IUFM - François Baluteau p. 73-85 Les usages du savoir sociologique dans un contexte de formation. Le cas des formateurs d'IUFM De quelles façons les formateurs en IUFM interprètent-ils le rôle des produits des sciences sociales, principalement sociologiques? Sous quelle(s) forme(s) la connaissance sociale est-elle déplacée dans les situations de formation? Quels rapports les formateurs établis-sent-ils avec leur organisation? Telles sont les questions auxquelles ce texte tente d'apporter des réponses. L'activité et l'expérience des formateurs sont ainsi abordées en fonction de données biographiques (itinéraire de formation, parcours professionnel, statut occupé...) et contextuelles (attentes perçues chez les formés, modalités des épreuves de certification, recommandations locales...) pour comprendre le recours aux savoirs issus des sciences sociales..How Sociological knowledge is used in a Teacher Training context. The case of Teacher Trainers in the IUFMs (The French Teacher Training Colleges) In what ways do the IUFM teacher trainers interpret the role of what the social sciences produce, especially sociology? In what form or forms is social knowledge out of place in the situation of teacher training? What relations do the teacher trainers have with their organization? These are the questions to which this article seeks to find some answers. This activity and the experience of teacher trainers are thus examined according to biographical data (educational background, career path, present position...) and contextual ones (students' expectations, the methods for testing and certifying students, local recommendations...) in order to understand the recourse to knowledge stemming from the social sciences.
- La place de la sociologie dans la formation des enseignants : réflexions didactiques - Philippe Perrenoud p. 87-99 On ne saurait former des professionnels réflexifs sans leur donner accès aux savoirs des sciences humaines et sociales permettant de penser les processus d'éducation. Comment concevoir la place de ces disciplines dans un cursus de formation professionnelle et notamment la place de la sociologie? Les savoirs sociologiques peuvent-ils être mobilisables dans l'action professionnelle s'ils sont enseignés de façon ordonnée et autonome dans le cadre, par exemple, d'un cours de sociologie de l'éducation? Ou gagnent-ils à être incorporés à des thématiques pluridisciplinaires, au gré de démarches de formation clinique, dans des dispositifs d'alternance? Comment alors inscrire la sociologie dans les diverses didactiques (des langues, des mathématiques, de l'histoire, de la biologie, etc.)? Et comment l'intégrer aux approches transversales, portant sur des objets complexes tels l'évaluation, la gestion de classe, les relations familles-école, le rapport au savoir, le traitement des différences?The Place of Sociology in Teacher Training: Didactical Reflections
We won't be able to train enquiring professional teachers if we don't give them access to the wealth of knowledge of the human and social sciences, knowledge which will enable them to reflect upon educational processes. How can we conceive the rightful place for these disciplines, notably sociology, in a professional training course? Can sociological knowledge be mobilized into professional work if it is taught in an autonomous and ordered manner in the framework, for example, of a course in the sociology of education? Or would it gain by being incorporated into multi-disciplinary theme choices according to the given teaching procedures in alternative models? How can sociology come within the scope of different didactics (belonging to languages, mathematics, history, biology etc...? And how can it be integrated into transversal approaches, bearing on complex subjects like assessment, handling a class, family-school relations, the relations with knowledge or the treatment of differences? Varia
- Faire de la sociologie avec des étudiants. De l'usage de “l'herméneutique structurale” dans la formation des enseignants - Élisabeth Flitner, Andreas Wernet p. 101-113 Nous tentons d'expliquer, dans cet article, comment nous faisons des interprétations de petites scènes d'interaction enseignant-élèves dans le cadre de la formation universitaire de futurs enseignants. À partir d'un exemple d'interprétation (“Quand est-ce que vous vous rendez nos copies?”) nous réfléchissons sur le but et le sens possible de l'introduction d'une pratique de recherche dans la formation d'étudiants qui ne veulent pas devenir chercheurs mais professeurs dans le second degré.Studying Sociology with Students. Using ‘Structural Hermeneutics' in Teacher Training. In this article the authors attempt to explain how different interpretations can be made of short scenes involving teachers and pupils in the framework of teacher training. Starting from an example giving rise to diverse interpretations (‘When are you going to give us back our test papers?') the authors consider the aim and the possible meaning of introducing research practice in teacher training for those who do not wish to become professional researchers but only secondary school teachers.
- La psychologie et le sens commun : croire le savant ou le profane ? - Ewa Drozda -Senkowska, Arlette Streri p. 115-126 Les liens entre le monde de la science, avec ses expériences de laboratoire, et le monde profane, préoccupé de ses expériences quotidiennes, apparaissent paradoxalement à la fois très intimes et distendus. La psychologie scientifique éclaire par ses témoignages ces difficultés de communication. Dans ce domaine, en effet, où le langage utilisé est souvent accessible à tous, l'écoute attentive et réciproque ne semble pourtant pas naturelle à ces deux mondes. À partir d'exemples choisis dans deux sous-disciplines de la psychologie, la psychologie de l'enfant et la psychologie sociale, les auteurs ont voulu rendre compte de ces difficultés, sans réellement pouvoir apporter de solutions qui permettraient, par une éducation réciproque, un partage éclairé du savoir.Psychology and Common Sense: Should we believe the Expert or the Layman ? The relation between the world of science and its laboratory experiments and the layman's world caught up in his everyday activities, seems paradoxically to be at once very close and yet also very loose. The scientific mind reveals these communication difficulties when presenting its observations. Indeed, in this domain where the language used is often accessible to everyone, close attentive listening to each other does not seem natural to either party. Starting from examples chosen from two sub disciplines of psychology: child psychology and social psychology, the authors have tried to account for these difficulties without really being able to bring any solutions which would enable, through mutual effort and education, both worlds to share knowledge in a more enlightened way.
- L'enseignement sociologique au lycée : entre problèmes sociaux et sociologie savante - Élisabeth Chatel, Gérard Grosse p. 127-139 Dès sa création, en 1966, au sein d'une discipline, l'enseignement de la sociologie aux lycéens français se fixe pour objectif le développement d'une posture réflexive et d'un point de vue critique sur le monde social. Une enquête, menée auprès d'élèves de Première, montre dans quelle mesure cet objectif est en partie atteint. Les dispositifs didactiques de mise en œuvre sont analysés dans leur tension entre deux modèles. L'un, le recours à “l'analyse sociale”, prévalait jusqu'aux années 1980, l'autre, qui tend à se développer, est plus proche d'une initiation à la sociologie. Ces deux orientations font débat entre les enseignants, ce qui influe sur l'évolution du curriculum, tant formel que réel, d'autant que son contenu se révèle particulièrement sensible à la dimension politique des évolutions sociales. Par cette triple entrée — la réception de l'enseignement par les élèves, les contours du curriculum formel, ceux du curriculum réel— nous avons voulu illustrer la complexité des évolutions curriculaires et en dégager les ressorts.Teaching Sociology in Secondary Schools: The Divide between Social Problems and Sociology as an academic discipline. From its creation within a discipline in 1966, the teaching of sociology to French secondary school pupils aims at developing a thoughtful approach and a critical viewpoint on social questions. A survey carried out with lower sixth form pupils ( 11th grade) showed the extent to which this aim had been met. The didactical methods used are analysed keeping in mind the rival tension between the two models. The first one involving a recourse to ‘social analysis' was prevalent up until the 1980's while the second, which tends to be developing, is closer to an introduction to Sociology. These two approaches give rise to debate amongst teachers which, in turn, influences the development of the curriculum, both formally and in substance, all the more so the subject contents show themselves to be particularly sensitive to the political dimension of social developments. Through this three-fold approach — how the pupils receive this teaching, the scope and formal nature of the curriculum, the curriculum in itself— the authors have sought to illustrate the complexity of curriculum development and to bring out the driving forces at work to explain it.
- Faire de la sociologie avec des étudiants. De l'usage de “l'herméneutique structurale” dans la formation des enseignants - Élisabeth Flitner, Andreas Wernet p. 101-113
Comptes rendus
- Lectures - p. 141-160