Contenu du sommaire : Éducation et genre
Revue | Carrefours de l'éducation |
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Numéro | no 17, mai 2004 |
Titre du numéro | Éducation et genre |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Quelques concepts clefs pour penser et former à la mixité - Cendrine Marro, Françoise Vouillot p. 2-21 Les écrits dénonçant l'insuffisance d'une réelle application pensée et construc- tive du principe de mixité ne manquent pas. De nombreux faits et résultats de recherche reflètent la pertinence toujours bien actuelle de cette dénonciation. Le présent article en propose un bref rappel pour se centrer ensuite sur un examen des concepts clefs qu'il est nécessaire de considérer pour penser la mixité, tels ceux de coéducation, d'égalité, de différence, de genres et de rapports sociaux de sexe. Dans une perspective de formation des acteurs et actrices du système éducatifs et de mise en œuvre concrète, quotidienne et constructive de pratiques permettant au principe de mixité de devenir enfin une réalité, les auteurs renouent avec le concept du rôle du sexe et suggèrent de distinguer les rôles de sexe traits/comportements des rôles de sexe activités/tâches. Cette distinction moins anodine qu'il y paraît de prime abord est un levier pour envisager la transgression des normes du sexe, entraves à l'égalité, et audelà, leur nécessaire sunversion.
- Conflits internes des savoirs chez les étudiantes musulmanes portant le foulard islamique - Triki-Yamina Amina p. 22-40 Notre enquête porte sur les conflits engen-drés par la coexistence entre les savoirs laïques et religieux chez des étudiantes françaises musulmanes, d'origine maghrébine, vivant en France, et dont la particularité est de porter le foulard islamique et, éventuellement, de fréquenter régulièrement la mosquée. Nous avons détecté deux formes de conflits des savoirs dans le discours de dix-sept jeunes femmes interviewées: conflit interpersonnel confrontant les étudiantes musulmanes portant le foulard islamique à l'institution laïque et conflit interne vécu par les jeunes femmes elles-mêmes. Dans l'analyse de leur discours, il est question de tenir compte des prescriptions coraniques à propos du foulard et d'utiliser le concept de Moi-peau développé par D. Anzieu afin de comprendre comment le foulard peut devenir un mode de gestion des conflits internes des savoirs chez ces étudiantes musulmanes. Ainsi le foulard, en tant qu'enveloppe textile, remplit les fonctions fondamentales de la peau: celles de contenance, de protection et de filtrage. Si nous admettons que le foulard est une enveloppe textile de renforcement de la peau, peut-on parler d'un «Moi-foulard» réajustant la constance de l'appareil psychique à des moments où le Moipeau ne suffit plus?
- La disparition des filles dans les études d'informatique : les conséquences d'un changement de représentation - Isabelle Collet p. 42-56 Parmi les études scientifique et tech-nique, l'évolution de la discipline informatique attire l'attention car la part des femmes y est en régression depuis la fin des années 1980. Pour tenter de comprendre les raisons de ce recul singulier, cet article s'appuie sur deux recherches : une thèse en sciences de l'éducation en cours et une enquête qui s'inscrit dans le cadre des missions de recherche commandées par le Service des droits des femmes et de l'égalité. Nous regarderons comment la population des informaticiennes a évolué au cours du temps, puis comment la perception de l'informaticien et de l'ordinateur s'est modifiée au cours de la décennie 1990. Si le modèle du hacker est aussi ancien que l'invention des premiers ordinateurs, il est devenu prégnant sur les représentations du métier d'informaticien avec la généralisation du micro-ordinateur. Avant les années 1990, tant que l'informatique est perçue comme un métier technique du tertiaire, les femmes peuvent y entrer relativement nombreuses. Mais avec la généralisation du micro-ordinateur, le modèle du hacker se diffuse auprès du public. Ce modèle, culturellement familier aux garçons, possiblement désirable, activant les fantasmes de pouvoir dans lesquels les garçons sont éduqués, est devenu hostile aux filles. Elles désertent alors les études d'informatique.
- L'histoire de la mixité à l'ex-école polytechnique féminine (1969-2000) - Biljana Stevanovic p. 58-75 Cet article porte sur l'évolution de la mixité à l'e x -é c o l e Polytechnique féminine. Cette école d'ingénieurs, à l'origine destinée aux filles, a été fon dée en 1925 par Marie-Louise Paris, ingénieure elle-même. L'école Polytechnique féminine forme des femmes ingénieurs pendant 69 ans avant de devenir mixte en 1994. Depuis cette ouverture à la mixité, nous remarquons le renversement des pourcentages en faveur des garçons. En effet, en 2000, nous comptons seulement 37 % des filles à l'école. Nous nous interrogerons sur les causes de l'ouverture de l'école aux garçons et sur les conséquences que cette ouverture a provoqué sur la baisse des effectifs féminins. Pourquoi les filles ne se présentent-elles plus aux concours? Nous pensons que les filles ne se présentent plus à l'école parce qu'elles partent au profit d'autres écoles mieux placées que l'EPF, vers les classes préparatoires scientifiques pour intégrer des écoles plus réputées ou vers les écoles publiques parce que l'EPF est une école privée. L'entrée massive des garçons, dès la première année de la mixité, et la diminution des filles montrent que ce sont les garçons qui ont profité de cette ouverture.
- Filles et garçons en éducation : les recherches récentes - Céline Petrovic p. 76-100 Cette note de synthèse rela-tive à l'analyse des différences é d u c a ti v e s entre filles et garçons est publiée en deux parties. Cette première partie se propose de se consacrer à une réflexion préalable. Après la présentation des différents cadres théoriques intervenant dans les explications des différences entre les sexes, les recherches concernant les liens entre les différences physiques et les différences de comportements entre les sexes sont questionnées afin d'évaluer leur degré de dépendance. En second lieu, les interactions se déroulant au sein de la famille sont observées et analysées, c'est l'influence de la variable sexe sur le comportement des pères et des mères, des filles et des garçons qui est étudiée. La période couverte par cet article concerne les recherches de 1995 à nos jours. La seconde partie paraîtra dans un prochain numéro. Elle rendra compte des recherches récentes sur le développement de l'identité sexuée et abordera la contribution des acteurs-rices de l'institution scolaire sur la reproduction des rapports sociaux de sexe.
- Les professeurs de l'enseignement secondaire au début du xxe siècle : entre corporatisme et esprit de catégorie - Yves Verneuil p. 102-117 À l'orée du XXe siècle, les professeurs de l'enseignement secondaire ne se contentent plus de la représentation qui leur a été accordée au sein du Conseil supérieur de l'Instruction publique. Ils cherchent à en imposer à l'administration, en s'unissant en Fédération nationale. La République valorise la science; celle-ci sert aussi à contester la tutelle administrative. Les «libertés universitaires» doivent permettre à la corporation d'avoir son mot à dire sur l'évolution de l'Université. Les résultats de l'enquête Ribot accentuent cette ambition. Selon les professeurs de l'enseignement secondaire, la science et l'expérience concrète valent mieux que toutes les «fantaisies pédagogiques» auxquelles sont trop enclines les personnalités extérieures, y compris celles de l'enseignement supérieur. Pour être pris en compte, l'avis des professeurs de lycée et collège doit être exprimé par une Fédération nationale qui doit être la plus large possible, et comprendre, si faire se peut, les répétiteurs, voire les instituteurs. Mais comment former une telle «Grande Fédération», alors que les réformes issues de la Commission Ribot (professorat adjoint et rapprochement des enseignements secondaire et primaire), combattues par les professeurs, répondent aux revendications des répétiteurs et des instituteurs, avec qui les professeurs voudraient s'allier? Les réflexes catégoriels vont à l'encontre de la tentation d'une «Université corporatiste».
- L'expérimentation assistée par ordinateur, aide et obstacle en travaux pratiques de biologie au lycée - Brigitte Faure-Vialle p. 118-128 L'ExAO a été intro-duite dans un contexte scolaire derénovation de l'ensei- gnement expérimental faisant appel aux technologies de l'information et de la communication. Or l'absence de liaison entre ce procédé expéri mental et les pratiques et activités réalisées en classe a suscité de nombreuses questions de la part des enseignants de sciences de la vie et de la Terre. Cet article aborde la question de la rénovation des pratiques expérimentales dans l'enseignement de la biologie au lycée. Le point de vue abordé ici est d'ordre méthodologique et est axé sur l'approche expérimentale en biologie. Cette recherche étudie des activités et des pratiques expérimentales faisant appel ou non à l'ordinateur pour l'expérimentation. Plusieurs registres sont alors développés. Dans une approche socio-logique, un bilan de l'introduction de l'ExAO dans les lycées est dressé. Différentes analyses et enquêtes explorent les usages de l'ExAO. Dans un registre épistémologique, les pratiques des chercheurs en biologie servent de référence aux pratiques des élèves en travaux pratiques. Deux points essentiels sont abordés: l'apport de l'ExAO à l'enseignement et l'apprentissage de la biologie au lycée; les perspectives à envisager. L'auteur met enfin en lumière que le décalage entre cette expérimentation et les pratiques expérimentales correspondantes est dû à l'introduction de l'ExAO dans un enseignement traditionnel.
- Aux marges de la pédagogie institutionnelle : les colonies de vacances - Jean Houssaye p. 130-141 Pourquoi la péda-gogie institu-tionnelle est-elle si peu présente dans les centres de vacances ? On peut d'autant plus s'en étonner que, par certains côtés, on peut considérer que cette pédagogie est née dans les colonies de vacances. Il faut donc chercher les raisons de cet effacement : Freinet en est-il la cause ? Oury en est-il responsable ? Les éléments que l'on peut trouver sur cette question dans les principes du mouvement Freinet valent-ils pour la pédagogie institutionnelle ? À l'examen du dossier, il apparaît que ce qui sépare ces deux mouvements pédagogiques s'inscrit précisément dans ce qui caractérise le fonctionnement des centres de vacances et fait de la pédagogie institutionnelle un référent qualifié pour les centres de vacances.
- Le discours silencieux du corps enseignant : La communication non verbale du maître dans les pratiques de classe - Jean-François Moulin p. 142-159 Dans le silence et l'immobilité le corps de l'ensei-gnant ne cesse de communiquer, tous ses comportements m an i fe stes, conscients ou inconscients ont valeur de messages et les élèves sont sensibles à tous ces signes et indices: leurs conduites en classe sont directement liées à la perception qu'ils ont de ces messages. L'objectif de cette recherche est de mettre en évidence les différents types de comportements non verbaux utilisés plus ou moins consciemment par le maître, en étudier l'incidence sur les interactions sociales dans la classe et sur la qualité de ce que l'on pourrait appeler le «climat de la classe» qui détermine, on le sait, l'efficacité de l'acte d'enseignement. Nous avons donc procédé à une analyse descriptive de comportements magistraux observables dans des pratiques de classe et des effets produits sur les groupes d'élèves. Les observations portent sur les actes de communication dans des situations d'enseignement du premier degré et concernent essentiellement les comportements non verbaux (comportements posturaux, gestuels ou relatifs à l'utilisation de l'espace) ou verbaux non spécifiquement linguistiques (intonations, rythmes et débit verbaux). Après avoir identifié et répertorié les différents éléments de cet aspect de la communication pédagogique et étudié leurs incidences possibles sur le comportement des élèves nous proposons des hypothèses de travail qui donneront lieu à des expérimentations pour la suite de cette recherche.
- Groupe, groupe-classe et individu dans l'école maternelle grecque - Maria Moumoulidou p. 160-176 L'école maternelle grecque utilise trois modes d'enseigne-ment préscolaire (le groupe, le groupeclasse, l'individu). Cet article vise à offrir l'image la plus globale possible de ce niveau d'enseignement. Il définit les trois modes de travail cités et, après un exposé historique s'appuyant sur des textes officiels et qui commence au XIXe siècle, il présente la façon dont ils ont été mis en place. Cet article s'efforce de déceler les raisons pour lesquelles les différentes tentatives de changement pédagogique et didactique échouent et la raison pour laquelle l'adoption d'une forme d'enseignement reposant sur le travail par groupes – en dépit des recommandations des instructions pédagogiques officielles – rencontre des difficultés insurmontables. Celles-ci trouvent leur source aussi bien dans les finalités de l'école maternelle grecque que dans l'absence d'une réelle identité de celle-ci. Elles prouvent, de la part des instances éducatives grecques, une certaine méfiance envers l'éducation de la petite enfance. En effet, il n'existe quasiment pas de réflexion pédagogique approfondie sur l'enseignement préscolaire, et il ne faut pas non plus négliger l'adoption – voire l'imitation – de modèles pédagogiques qui sont nés et se sont développés ailleurs. Enfin, l'article aborde la façon dont les enfants accèdent au savoir.
- Religion et éducation en Irlande du Nord - L. Philip Barnes p. 178-195 La question de la place de la religion dans l'enseignement en Irlande du Nord reflète bien les luttes entre catholiques et protestants qui jalonnent son l'histoire. Dès 1923, la législation tente d'ins taurer une éducation intégrée accueillant les élèves appartenant aux deux confessions qui, d'une manière encore plus prononcée en ce qui concerne les catholiques, ne peuvent admettre une mesure qui remet en question le primat de l'éducation chrétienne. Toutefois, à partir de 1930 se développe un enseignement dual comportant des écoles d'État dont font partie les écoles protestantes qui y trouvent un intérêt financier et des écoles catholiques subventionnées à 50 %. Cette inégalité de traitement disparaît en 1992 avec la prise en charge totale de ces dernières par l'État. Cependant, la préservation du caractère plus ostensiblement confessionnel des écoles catholiques entretient un climat de tension. La sécularisation de la société à partir des années soixante creuse le fossé entre les deux types d'écoles. En 1981 une évolution décisive se réalise avec l'ouverture d'une école intégrée qui inaugure un processus dont l'objectif est de réaliser l'unité de la communauté. Une part croissante de la population exprime son intérêt pour cette forme scolaire mixte, plus démocratique, moins sélective et moins marquée par l'enseignement religieux. Mais les Églises manifestent leur réticence devant le risque de laïcisation par leur éviction des conseils d'administration. Leur accord se réalise en 1992 sur un autre point : le programme commun d'enseignement religieux centré sur le christianisme.
- L'association des enseignants et chercheurs en sciences de l'éducation - Michèle Guigue, Patrick Rayou p. 196-199
- Notes de lecture - p. 200-221