Contenu du sommaire : Nouveaux regards sur la critique d'art au XIXe siècle
Revue | Sociétés & Représentations |
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Numéro | no 40, 2015 |
Titre du numéro | Nouveaux regards sur la critique d'art au XIXe siècle |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Nouveaux regards sur la critique d'art au XIXe siècle
- La critique artistique et musicale, un objet de recherches à investir au croisement des disciplines - Isabelle Mayaud, Séverine Sofio p. 9-24
- « Maréchaux de la curiosité » et critiques : la diversité des discours sur la peinture à la fin du XVIIIe siècle siècle - Sarah Bakkali p. 25-41 On sépare traditionnellement les discours sur la production artistique entre ceux de la critique officielle du Salon, prétendument légitime et désintéressée, et ceux du monde du commerce, souvent considéré avec méfiance par cette critique et les institutions. Cette étude s'interroge sur la place du « discours marchand » dans l'ensemble des discours sur la peinture à la fin du XVIIIe siècle.Nous abordons d'abord les origines de ce discours marchand et tentons d'en définir les contours et le profil de ses orateurs. Nous évoquons ensuite la place de ce discours face à ce qu'on appelle la « critique » au travers des trois principaux enjeux : l'autorité morale à discourir, la légitimité du jugement et la promotion d'un art édifiant et patriotique.Sur ce dernier enjeu, il apparaît à la fin du XVIIIe siècle un net rapprochement entre les deux discours. On observe en particulier que les plus importants marchands de l'époque n'hésitent pas à littéralement s'approprier la posture et le discours du critique. Cette mutation s'inscrit dans une stratégie de construction d'une image et aussi de rapprochement avec le pouvoir et les institutions, et en premier lieu le Muséum.« Maréchaux de la curiosité » and critics: diversity of discourses on French painting at the end of the 18th centuryDiscourses about art are usually separated between the official criticism of Salon, regarded as legitimate and disinterested, and the dealers one, often regarded with suspicion by the world of critics and institutions. The present study deals with the place of the dealers discourse in the whole discourses about art in the late eighteenth century.First, the origins of the dealers discourse is discussed followed by attempt to define its boundaries and the profile of its players. Then the place of this discourse facing to the critics through three main issues: the moral authority to discourse, the legitimacy of judgment and the promotion of an edifying and patriotic art.
- Critiquer, mais de quel droit ? : Les fondements juridiques et jurisprudentiels du droit de critique au XIXe siècle - Matthieu Béra p. 43-60 Cet article se propose de revisiter le droit de la critique tel qu'il a été mis en place au XIXe siècle autour du code civil (1804), des notions de faute, préjudices et responsabilité civile qu'il soulève, mais aussi autour des lois de 1819 et 1822 inaugurant les droits de la diffamation et de réponse, reprises par la loi de 1881 toujours en vigueur aujourd'hui. Le XIXe siècle est donc à l'origine du droit actuel qui, bien que méconnu par les acteurs (critiques, artistes), est à la fois respecté et peu sollicité dans des procès. Les acteurs en présence savent qu'ils ont peu intérêt à « juridiciser » leurs relations, même quand elles sont parfois difficiles.This article deals with the French legislation on critics which has been built during the beginning of the nineteenth century. It concerns the French Civil code of Napoléon (1804) with the notions of fault, prejudice, civil responsibility but also the rights to reply (1822) and defamation (1819), which have been reconducted in 1881 and are still applied in 2015. Thus, the Nineteenth century is at the very origin of the present right which is regulating the relations between critics and cultural productors (actors, artists, and so on). Even if the law is unknown in its details, it is well applied. Everybody also understand that it's much better to avoid trials.
- « Que Van Beers fasse des tableaux et non des procès » : L'affaire Van Beers-Solvay et l'émancipation de la critique d'art belge au tournant du XIXe siècle - Katrien Dierckx p. 61-74
- Sauver la critique, défendre les critiques. Les stratégies d'un porte-parole : l'Association syndicale professionnelle et mutuelle de la critique dramatique et musicale (France, 1877-1914) - Isabelle Mayaud p. 75-94 Le Cercle de la critique musicale et dramatique fondé en 1877 et transformé en 1902 en Association syndicale professionnelle et mutuelle est le premier représentant auto-proclamé de la profession. Cet article revient sur les premières années d'existence du groupe et examine les stratégies de regroupement déployées par le collectif dans un contexte de transformation de la morphologie sociale de la population des critiques. Notre enquête montre comment la négociation des statuts contribue à préciser la position du groupe dans la controverse relative à la régulation de la critique et à circonscrire les frontières de la vraie critique, en définitive à produire une définition des critiques légitimes.Save criticism, protect the critics. The “Association syndicale professionnelle et mutuelle de la critique dramatique et musicale” and its representative strategies (France, 1877-1914)The Cercle de la critique musicale et dramatique founded in 1877, became the Association syndicale professionnelle etmutuelle in 1902. It was the profession's first self-elected representative group. This article addresses the group's early years and focuses on its collective strategies in the context of the crucial evolution of the profession's social morphology. Our survey shows how the negotiation on the issue of the critics'status at that time contributed directly to determine the group's position in the controversy over the regulation of music and theatre critics' activities and over the boundaries of what was perceived by the group's members as true criticism, ultimately producing a definition of what a legitimate critic could be.
- La critique en portraits : Camille Delaville et ses contemporaines - Juliette M. Rogers p. 95-110 Cet article traite d'une forme singulière de critique d'art, celle proposée par la journaliste et romancière Camille Delaville dans une série d'articles consacrés aux parcours et aux œuvres de différentes femmes, artistes ou écrivains, de cette époque. Cette série, intitulée « Mes Contemporaines », est publiée en 1887 dans le Le Constitutionnel. On se propose ainsi, dans ce texte, d'étudier la manière singulière dont procède Delaville dans cette « critique en portraits », bien différente du format traditionnel des comptes rendus de Salon publiés par centaines dans les journaux tout au long du siècle.Art criticism through portraits: Camille Delaville and her women contemporaries
This article's “new look” at nineteenth-century art criticism offers an exploration of a non-traditional example of art criticism. In contrast to the well-known Salon essays, published by the hundreds in newspapers during the three months of the official Salon each year, we examine a source of art criticism that was often dismissed as frivolous or prosaic: the “feminine” column in the newspaper. We reveal how it is in fact the site of serious criticism for women artists in the series of portraits titled “Mes Contemporaines” published in serial form in 1887 by Camille Delaville. We study not only the five individual women artists that Delaville chooses to write about, but also the format and the “supplementary” details that she adds to create a diversity of portraits that are more complete representations of each woman. In this way, Delaville's portraits expand our understanding of what nineteenth-century art criticism could include, and allow a glimpse of an expanded public that appreciated women in the fine arts during this period. - Les femmes artistes sous presse : Les créatrices vues par les femmes critiques d'art dans la presse féminine et féministe en France autour de 1900 - Charlotte Foucher Zarmanian p. 111-127 La production critique des femmes sur l'art au XIXe siècle est devenue depuis plus de trente ans un véritable objet d'étude. Dans l'un des plus récents ouvrages sur la question, Women Art Critics in Nineteenth-Century France. Vanishing Acts (2013), son auteure Wendelin Guentner reconnaît toutefois que la critique d'art délivrée dans la presse féminine de la seconde moitié du XIXe siècle a jusqu'à présent peu suscité l'attention des chercheurs. Loin de prétendre combler l'ensemble de ce vide, cet article examine plus particulièrement les discours publiés dans la presse féminine et féministe (Femina, La Vie heureuse, La Fronde, La Citoyenne...) en ce qui concerne les femmes artistes autour de 1900. Dans un contexte plutôt favorable à l'émancipation des femmes dans les mondes de l'art, nous verrons comment les femmes critiques d'art traitent du sort de leurs consœurs créatrices. Vont-elles participer à la conquête de nouveaux droits, contribuer à une plus grande visibilité de leur statut, ou au contraire reconduire stéréotypes et clichés ? Cet article souhaite examiner la multiplicité des pratiques et dispositifs d'écriture mobilisés par ces auteures tout en prêtant attention à la marge des perceptions et définitions possibles au sein des féminismes.Women Artists in Press. Women Artists Seeing by Women Art Critics inside Feminine and Feminist Press in France around 1900For thirty years now, women's production in the domain of art criticism has now become a field of study. However, in her most recent book on this topic, Women Art Critics in Nineteenth-Century France. Vanishing Acts (2013), Wendelin Guentner shows that only a few studies have been produced on the critiques published in women's newspapers and magazines during the second half of the 19th century. This article precisely focuses on French women's and feminist newspapers (like Femina, La Vie heureuse, La Fronde, La Citoyenne...) and analyses their journalists' views on women artists around 1900. While the social context was, at that time, rather in favor of women's emancipation in the art worlds, I emphasize women authors' discourses, in these venues, on the artworks created by women. Do these articles participate to the conquest of new rights for women and to a greater visibility of their demands, or do they reproduce sexual stereotypes and cliches? I show in this paper not only the diversity of these female journalists' practices, opinions and styles, and of the perceptions and definitions of what feminism could be at that time.
- La critique face aux Méditateurs ou la peur de la déchéance de l'école française autour de 1800 - Saskia Hanselaar p. 129-144 À l'extrême fin du XVIIIe siècle, après de nombreux bouleversements politiques, sociaux et artistiques, la critique constate amèrement les conséquences des décisions prises pendant la Révolution française. Afin d'enrayer l'influence d'un groupe sectaire, appelé les Méditateurs et tous élèves de David, jugés néfastes pour l'école française, les critiques lancent plusieurs mises en garde à certains jeunes peintres d'histoire entre 1799 et 1803 afin que ceux-ci ne s'écartent pas d'une politique mise en place bien avant le démantèlement des Académies. La peinture d'histoire doit rester forte et hiérarchisée, reprenant ainsi un enjeu réaffirmé dès le milieu du XVIIIe siècle. C'est pour cela que la critique tente, par de nombreux pamphlets, de définir l'indiscipline de ces jeunes gens et de reprendre en main la direction que doit suivre l'école française.Critics versus Méditateurs: the fear of French School's decline around 1800At the turn of the Eighteenth-century, after numerous political, social and artistic changes, critics bitterly see the consequences of some decisions taken during the French Revolution. Trying to stop the influence of a young group of painters, called Méditateurs and all students of David's studio, many press actors launch warnings texts against their strange way of thinking history painting, which is against the way that the French School was lead during the second half of the Eighteenth-century, even without the Académies. History painting has to stay strong as it represents the efficiency of the French School and its supremacy over all the others. That is why échotiers criticize sternly new approaches developped by those young artists.
- Le privilège des femmes dans la critique d'art en France, 1785-1815 - Heather Belnap Jensen, Séverine Sofio p. 145-161 De 1785 à 1815, un groupe réduit mais extrêmement visible d'écrivaines – certaines anonymes, d'autres plus reconnues – a publié plusieurs textes sur les beaux-arts dans la presse périodique ainsi que dans des romans, des guides touristiques, des mémoires et d'autres espaces littéraires, contribuant ainsi au domaine naissant de la critique d'art. Étant donné leur position extérieure ou marginale vis-à-vis de l'Académie et des instances officielles de régulation du monde de l'art, ces femmes sont demeurées à la périphérie de celui-ci. Néanmoins, elles ont su capitaliser sur leur statut d'outsider en mettant en avant leur identité de femme dans leurs écrits, afin de faire de leur appartenance sexuée l'origine d'un point de vue privilégié sur l'art contemporain et la société de leur temps. En mobilisant la théorie féministe du point de vue (standpoint theory) qui soutient que les individus provenant des marges de l'espace social ont une conscience alternative des phénomènes sociaux, cet article montre comment certaines femmes qui ont écrit sur l'art ont fondé leur droit à contribuer à la critique d'art en raison de leur sensibilité particulière, de leur supériorité morale et de leur capacité à proposer des critiques sincères et impartiales.From 1785 to 1815, a small but visible number of women writers, ranging from the anonymous to the renowned, published on art in the periodical press and in novels, guidebooks, memoirs and other venues, thereby joining the nascent field of art criticism. Given their exclusion from (or secondary status within) the Academy and other art institutions, these women found themselves operating at its periphery. Many of the female art critics of this era capitalized on their outsider status, foregrounding the matter of their sex and promoting it as a privileged position from which to offer their analyses of the contemporary French art scene and Revolutionary society. Using the construct of standpoint theory, which contends that individuals who operate on the fringes of social spacesare able to provide an “oppositional unconsciousness”, this essay seeks to demonstrate how some women writing on art declared their right to participate in the critical enterprise by virtue of their predisposition for sensibilité and hence moral superiority, as well as their ability to offer sincere, untainted critiques.
- « Toutes les directions sont incertaines et combattues » : les peintres, les critiques et l'imposition de la bataille romantique - Séverine Sofio p. 163-181 Dans les années 1820-1830, la critique devient une pratique non seulement légitime, au carrefour des espaces artistique, littéraire, politique et journalistique, mais aussi relativement homogène dans les formes qu'elle prend, dans le profil de ceux qui la pratiquent ou dans ses supports. C'est aussi le moment où l'on voit à l'œuvre, pour la première fois, son extraordinaire force de prescription. On revient ainsi dans cet article sur les évolutions croisées des espaces journalistique, littéraire et artistique qui ont fait converger, temporairement, les intérêts d'une génération de critiques et de peintres dans le contexte d'un monde de l'art déboussolé par la fin de l'École de David. Pour rendre lisibles les enjeux du Salon, les critiques, issus de l'espace littéraire, ont importé dans le domaine des beaux-arts la grille de lecture de la « bataille romantique » et imposé ainsi une lecture binaire des controverses qui structurent alors le monde de la peinture. La fortune critique de cette dialectique « classique versus romantique » dans l'appréhension de l'art de cette période est telle qu'elle a durablement marqué l'histoire de l'art et fonctionne encore parfaitement aujourd'hui.In the 1820s and 1830s, art criticism in France becomes a legitimate activity and a standardized practice both in its forms and media, and in the social backgrounds of its authors. At this moment, art criticism also shows, for the first time, how extraordinarily prescriptive it can be. In this paper, I focus on the intertwined evolutions of press, literature and fine arts which led to a temporary convergence of the interests of painters and critics from the “generation of 1820”, in the context of a deeply unsettled art world after David's exile. To make what was at stake in the Salons legible for their readers at this time, critics (most of them being aspiring writers) imported the “romantic battle” in the art world, imposing therefore a literary binary model on specifically aesthetic controversies in a multipolar art world. Though artificially imposed on the 1820-1830s artistic debates, the critical fortune of this “romantic vs. classic” dialectic is such that its impact on French art historiography is still valid today.
- La lithographie passée en revues : entre controverses politiques et enjeux esthétiques - Gervaise Brouwers p. 183-200 L'apparition de la lithographie, qui permet d'imprimer des dessins à partir de supports en pierre, révolutionne les techniques de l'estampe. Dès 1817, ses productions envahissent les rues. Mais hormis un compte rendu à l'Académie, relayé par certaines publications périodiques, ce procédé est quasiment ignoré des rubriques artistiques jusqu'en 1823. Ce mépris s'explique d'abord par la faible qualité de la plupart des dessins produits. Mais surtout, les thématiques (la nostalgie de l'épopée napoléonienne) et les genres (la caricature, les scènes populaires) qu'elle aborde gênent la propagande officielle de Louis XVIII, qui contrôle les principaux journaux et fait tout pour museler la presse d'opposition. Les lithographes s'écartent donc de la voie de la contestation. C'est en représentant les paysages romantiques qu'ils révèlent l'identité esthétique de l'impression sur pierre et trouvent leur place dans les colonnes artistiques des journaux.The birth of lithography, a way of reproducing drawings from stone, revolutionizes print techniques. From the year 1817, lithographic productions spread into Parisian streets. But, except an account from the French Academy relayed by some periodicals, this proceed is almost ignored by art commentators until 1823. This contempt is partly due to the poor quality of most of the drawings made from stone. But, above all, royal power, bothered with its main theme (Napoleonic nostalgia) and its genres (caricature and popular scenes), makes everything possible to silence the opposition and control the press. The lithographers can't be the voice of contestation anymore. Finally, it is by representing romantic landscapes that the stone reveals its aesthetic identity and gets a place in the artistic columns of periodicals.
- La critique de la photographie ou la genèse du discours photographique dans la critique d'art, 1839-1859 - Paul-Louis Roubert p. 201-219 Cet article s'attache à décrire le phénomène qui a permis à la photographie de devenir un outil critique de la représentation au milieu du XIXe siècle. Révélée au public en 1839 sous la forme du daguerréotype, la photographie fut tout d'abord un objet de curiosité dont les performances ont été décrites par la presse généraliste et scientifique pendant tout le processus de révélation du secret de son invention. Soutenue par l'émergence du commerce du portrait photographique au début des années 1840, la photographie deviendra pour la critique d'art un objet de débat lorsque ses implications formelles et théoriques seront mises en regard de la production des artistes français exposée au Salon des beaux-arts. Une situation qui poussera certains photographes mus par l'ambition artistique à produire une première ébauche de critique photographique.Criticizing photography: the origins of a discourse on photography in French art criticism, 1839-1859This article attempts to describe the phenomenon that allowed photography to become a critical tool of the representation in the mid-nineteenth century. Revealed to the public in 1839 as the daguerreotype, photography was first a curiosity whose performances have been described by the general and scientific press during the whole process of revelation of the secret of the invention. Supported by the emergence of portrait photography in the early 1840s, photography became a debate object for art critics when its formal and theoretical implications will be compared to the production of French artists exhibited at the Salon des beaux-arts. A situation that will push some photographers moved by un artistic ambition to produce a first draft photography critic.
- Le commerce de la critique : journalisme musical et corruption au milieu du xixe siècle - Rémy Campos p. 221-245 Au xixe siècle, le développement d'une presse musicale spécialisée et la présence dans la plupart des quotidiens et des revues de feuilletons dédiés à l'actualité musicale ont multiplié les occasions de controverses artistiques. Celles-ci ont été généralement étudiées d'un point de vue exclusivement esthétique. À partir d'une querelle sur la nature de la musique liturgique et plus précisément sur le style idéal de la musique d'orgue à l'église déclenchée en 1856 par le plus célèbre critique musical du moment, François-Joseph Fétis, cet article met à jour la nature complexe de la critique musicale, en prise directe avec des intérêts financiers parfois considérables alors qu'elle proteste sans cesse de son désintéressement.Le décalage entre discours public et commerce de l'art est particulièrement frappant dans les correspondances privées. Dans le cas étudié, les manœuvres occultes d'Aristide Cavaillé-Coll, chef d'une manufacture d'orgue parmi les plus prospères d'Europe pour imposer tel ou tel artiste lors de l'inauguration de l'un de ses instruments, déterminent les prises de position dans l'espace public de la plupart des acteurs du scandale déclenché par Fétis. Ainsi, ce qui semblait une pure controverse esthétique s'avère sous-tendu par une économie du jugement qui ne s'élabore pas seulement dans la solitude du cabinet du critique mais est la résultante d'un jeu de forces en prise directe avec le marché des biens musicaux.The trade of criticism: Music journalism and corruption in the mid nineteenth century
During the nineteenth century, the development of a specialized musical press and the presence in most newspapers and reviews of articles dedicated to music news, have multiplied the opportunities for artistic controversies. These have generally been considered from an exclusively aesthetic standpoint. Analysing a dispute about the nature of liturgical music and more precisely about the ideal style of organ church music initiated in 1856 by the most famous music critic of the moment, François-Joseph Fétis, this article considers the complex nature of music criticism, in connection with considerable financial interests while constantly protesting his disinterestedness.The gap between public discourse and art trade is particularly striking in private correspondence. In the case studied, the occult proceedings of Aristide Cavaillé-Coll, head of an organ factory among the most prosperous in Europe, to impose artists at the inauguration of one of its instruments, determine the positions taken in the public space of most players in the scandal triggered by Fétis. Thus, what seemed a pure aesthetic controversy proves underpinned by an economy of judgment that is not only developed in the solitude of the critic's office but is the result of a play of forces in tune with the market musical property.
Vingt ans
- Introduction - Bertrand Tillier, Myriam Tsikounas p. 251-256
- Pluridisciplinaire et ouverte : une rétrospective statistique de Sociétés & Représentations - Anne-Élisabeth Andréassian p. 257-263
- Au carrefour des disciplines, au gré des écrans et au défi de l'accès : deux décennies de revues de sciences humaines et sociales en France (1995-2015) - Julien Hage p. 265-276
- Les représentations au Moyen Âge : quelques pistes de réflexion - Claude Gauvard p. 277-287
- Entretien avec Roger Chartier - Roger Chartier, Évelyne Cohen, Pascale Goetschel p. 289-321
- Entretien avec Arlette Farge - Arlette Farge, Bertrand Tillier, Myriam Tsikounas p. 323-328
- Représentations et idées-images au temps des Lumières : « Prisonnier en fantôme », « pensées nocturnes » du libraire Pierre Frémont, « dernier mot » des suicidés - Michel Porret p. 329-336
- Le risque, pour l'historien désireux de comprendre le passé, de savoir ce qui est advenu après la période qu'il étudie - Alain Corbin p. 337-342
- L'inscription dans un courant historiographique majeur - Philippe Artières p. 343-349
- Quelques notes succinctes sur les deux corps de la Représentation - Pascal Ory p. 351-355
- Représentation : la dimension cognitive du terme - Nathalie Heinich p. 357-360
- Postface : De l'avenir du passé - Dominique Kalifa p. 361-365