Contenu du sommaire : Dinámicas del poder: historia y actualidad de la autoridad andina
Revue | Bulletin de l'Institut Français d'Etudes Andines |
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Numéro | volume 37, no 1, 2008 |
Titre du numéro | Dinámicas del poder: historia y actualidad de la autoridad andina |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
- Introducción - Chantal Caillavet, Susan Elizabeth Ramírez p. 1-2
Primera Parte: El tiempo de los Antiguos
- Negociando el imperio: el Estado inca como culto - Susan Elizabeth Ramírez p. 5-18 Cet essai met en relation le système de croyances des Inca avec la construction d'un État multiethnique dans le but de réévaluer les facteurs principaux qui ont motivé leur expansion. L'idée est proposée selon laquelle le soit-disant Empire inca, à la différence du modèle romain, consistait davantage en un regroupement de sujets fidèles au culte d'État. Celui-ci était représenté par un personnage central, manifestation du fondateur divin, qui se rendait en différents lieux de pélerinage, où il négociait, en personne ou par représentants interposés, les termes de la participation à ce culte. On n'est donc pas en présence d'une organisation omnipotente et hautement centralisée, mais plutôt d'une construction où règnent la flexibilité et le compromis, et à laquelle les groupes ethniques adhèrent, à divers degrés, aux injonctions du pouvoir central. Le lien entre les croyances religieuses ou cosmologiques et la transformation d'un caciquat — fondé sur la parenté en un État inachevé, qu'unifient des attaches familiales réelles ou fictives ainsi que le culte à un ancêtre d'origine surnaturelle —, sert à assurer l'accès à la force de travail nécessaire à la conservation de l'ethnie au pouvoir.This paper makes a connection between the Inca belief system and the construction of a multi-ethnic state structure to reassess the motivating factors for Inca expansion. It documents the fact that the so-called Inca empire was less an empire in the Roman sense than a congregation of believers in a state cult, characterized by a central personage, the manifestation of a divine founder, who traveled to different pilgrimage centers, where he or his representatives negotiated the terms of cult participation. This is not a picture of a highly-centralized, omnipotent organization, but one where flexibility and compromise triumph and where ethnic groups adhere to central dictates to various degrees. The tie between religious belief or cosmology and the on-going transformation of a kin-based curacazgo into an unfinished state, unified by real or fictional kinship ties and a supernaturally-linked ancestor cult, is explained as a means of gaining access to the additional labor resources necessary for the ultimate preservation of the ruling ethnicity.
- La Capacocha como ritual político. Negociaciones en torno al poder entre Cuzco y los curacas - Annette Schroedl p. 19-27 Cet article étudie la fonction des rituels politiques dans l'état inca à travers l'analyse du cycle rituel de la Capacocha. Les cérémonies publiques de la religion d'État servaient de toile de fond aux négociations qui établissaient les relations politiques entre le souverain et ses subordonnés, c'est-à-dire les relations entre l'État et les peuples conquis et incorporés à l'empire inca. De cette manière, les rituels politiques contribuaient à la consolidation du pouvoir exercé par Cuzco sur les peuples andins. De plus, les rituels inca servaient à nouer des relations avec les élites locales, principalement les curacas, et à resserer les liens qui unissaient les peuples andins à l'état inca. L'article sera particulièrement consacré à cette relation entre le pouvoir étatique et les autorités locales au sein de l'empire inca.The aim of this article is to study the function of political rituals in the Inca state through the analysis of the Capacocha ritual cycle. The public ceremonies of the Inca state religion created a scene where political relations between the sovereign and his subordinates (i.e. the relations between the Inca state and the peoples that had been conquered and incorporated into the Inca realm) were being negotiated, thus contributing to the consolidation of power that Cuzco exercised upon the Andean peoples. Furthermore, the Inca rituals paid special attention to the establishment of relations with the local elites, mainly with the curacas, and to the reaffirmation of the ties that united the Andean peoples with the Inca state. The article will focus on this relation between state power and local authorities in the Inca realm.
- Las panacas y el poder en el Tahuantinsuyo - Francisco Hernández Astete p. 29-45 Cet article examine la catégorie des panaca : à partir de la bibliographie sur les Incas, de la relecture des sources coloniales disponibles et de la clarification de ce terme, l'analyse porte sur la division traditionnelle de la noblesse de Cuzco en dix ou douze panaca. L'hypothèse est que le Cuzco incaïque était divisé en deux groupes de nobles : une noblesse principale, appelée Capac Aillu, et une noblesse secondaire ou Hatun Aillu. Capac Aillu était constitué par les descendants des Incas et de femmes nobles (pana) tandis que Hatun Aillu, comprenait ceux qui étaient issus de femmes roturiaires provenant des élites locales. Finalement, on conclut que ces panaca correspondaient en réalité aux aillus composés des descendants de ces femmes nobles indentifiées comme pana.This analysis of the word and category «panaca» is examined based on the bibliography on the Incas and the available colonial sources. The traditional division of the Cuzqueño nobility in 10 or 12 panacas is disputed and it is proposed that the elite of the Cuzco of was divided into two groups of nobles: a main nobility called Cápac Aillu, and a secondary one called Hatun Aillu. Cápac Aillu was made up of the descendants of the Incas by noble women (pana), and Hatun Aillu included the descendants of the incas by other women belonging to the local elites. It is concluded that the so-called panacas were, in fact, the aillus made up of the descendants of the noble women identified as «pana».
- El Inca y sus curacas: poliginia real y construcción del poder - Tom Zuidema p. 47-55 Alors que les chroniques ne nous fournissent que peu d'information historique sur les anciens Curacas des alentours du Cuzco conquis par les Incas, nous possédons en revanche de nombreux éléments importants sur les relations matrimoniales, calendaires, politiques, rituelles et mythologiques que les descendants de ces Curacas, reconnus comme des «Incas par privilège», ont entretenues au Cuzco avec l'Inca. Au coeur de ces relations, les «Dames Iñaca», épouses ou soeurs des ces Seigneurs, jouaient un rôle essentiel.Although we have little historic data from the chronicles on the ancient curacas conquered by the Incas in the area around the city of Cuzco, we do have important data on the matrimonial, political, calendrical, ritual and mythical relations that the descendants of the curacas —known as the «Incas-by-privilege»— had with the Inca in the city of the Cuzco. The wives or sisters of these authorities, the señoras Iñaca, played an important role in these relations.
- «Como caçica y señora desta tierra mando...». Insignias, funciones y poderes de las soberanas del norte andino (siglos XV-XVI) - Chantal Caillavet p. 57-80 Pour la période 1530-1560, la documentation la plus précoce apporte des éléments sur les souveraines ethniques des Andes du Nord. Ces femmes de l'élite affirmèrent leur autorité et jouirent d'un pouvoir, dont les contours s'affirment dès lors que l'on cherche à identifier et à déchiffrer les objets emblématiques liés à la possession et à l'exercice de celui-ci. Certains semblent relever du matériel funéraire, d'autres ont pour fonction d'indiquer le rang. Mais la condition indispensable pour voir reconnu son statut de souveraine, c'est manifestement le privilège de disposer d' « indiens serfs », qui constituent une main-d'oeuvre occupée pour l'essentiel à faire travailler la terre. Ces serfs étaient aléniables selon le bon vouloir des autorités autochones en suivant un modèle dont on peut affirmer qu'il est andin en raison de sa durée et de son étendue géographique.Between 1530 and 1560, ethnic female authorities appear in the historical documents. The authority and positions of power of these elite women become apparent through the identification and analysis of emblematic objects tied to the possession and exercise of command. Some of these items seem to belong to funerary paraphernalia, while others function as indicators of status. But the necessary condition in order to be recognized as sovereigns seems to be the possession of « native servants », a work force dedicated essentially to tilling the land. These laborers were transferable to others according to the will of the native authority herself, in accordance with an Andean model whose widespread temporal and geographic dissemination is therefore reconfirmed.
- Negociando el imperio: el Estado inca como culto - Susan Elizabeth Ramírez p. 5-18
Segunda parte: Encarar la dominación
- De qadis y caciques - Karen B. Graubart p. 83-91 Cet essai met en avant la parenté que l'on observe entre la faible autonomie accordée aux communautés indiennes du Nouveau Monde, sous l'autorité d'un cacique, et de celle qui fut auparavant accordée aux communautés mudéjar ou musulmanes, sous l'autorité d'un qadi, dans la Péninsule Ibérique de la fin du Moyen Âge. Si le lien entre ces deux structures est évident dans le domaine du droit et dans celui de la conception idéale de l'espace, il se traduit également par l'échec de ces structures à « contrôler » les peuples conquis. Les cas de figure de Lima et de Séville montrent bien que les membres de ces communautés, en principe séparées, fonctionnaient en rapport étroit avec leurs colonisateurs.This essay proposes a connection between the limited autonomy granted to indigenous communities, under a cacique, in the colonized New World, and that previously granted to mudéjar or Muslim communities, under a qadi, in late medieval Iberia. Not only is the relationship between these two structures evident in terms of law and theoretical spatial organization, but also in terms of the failure of the structures to effectively «contain» their populations, as seen in archival evidence from Lima and Sevilla, where members of supposedly segregated communities worked interdependently with those of their colonizers.
- Los rituales del Estado colonial y las élites andinas - Iris Gareis p. 97-109 Tout comme l´Empire des Incas, l´État colonial créa ses propres rituels politiques. Ceux-ci eurent une grande importance pour l´articulation du pouvoir dans les Andes en offrant un espace pour négocier les relations de pouvoir entre le vice-roi et l'élite andine. Les curacas ont joué un rôle de premier plan dans le système colonial en tant qu'intermédiaires entre le pouvoir étatique et la population indienne. Aussi les curacas ont-ils participé aux rituels politiques de la vice-royauté. Mais ils ne se sont pas contentés d´un rôle de figurants dans la mise en scène du pouvoir colonial ; de fait, ils ont utilisé les rituels de la viceroyauté pour mettre en évidence leur position sociale élevée et pour consolider leur pouvoir politique au sein de l´État colonial.After the fall of the Inca Empire, the colonial state created political rituals of its own. These rituals were important for the articulation of power relations in the Andes. They offered a space for communication and negotiation articulating the different levels of the colonial society. As intermediaries between the state and the indigenous population, the Andean elites were of great importance for the colonial system. As a consequence, they also played a part in the political rituals of the colonial state. The Andean elites were, however, not content with the rôle of supernumeraries in the staging of colonial power and used the political rituals of the colony to highlight their social standing and to consolidate their own political power within the colonial state.
- Sacando a los caciques de la oscuridad del olvido. Etnias chachapoya y chilcho - Inge Schjellerup p. 111-122 Les recherches les plus récentes ont permis de mettre en relief le rôle majeur de certains caciques dans la vie coloniale et ont sorti de l'ombre des ethnies inconnues, ainsi que les sévères abus dont elles furent victimes. Cet article s'efforce de mettre en lumière des faits qui datent du XVIè siècle et se situent dans les départements de Chachapoyas et de Huallaga. Ce travail s'appuie sur des travaux de terrain en archéologie et en anthropologie ainsi que sur des recherches dans les archives péruviennes.Recent investigations permit us to identify some caciques as important actors in the colonial era and to identify some previously unnamed ethnic groups. They also reveal the extent that natives suffered from severe repression. This article highlights specific sixteenth century examples in the Chachapoyas and Huallaga regions, based on anthropological and archaeological fieldwork as well as research in Peruvian historical archives.
- Cuando el «punto de vista nativo» no es el punto de vista de los nativos: Felipe Guaman Poma de Ayala y la apropiación de tierras en el Perú colonial - José Carlos de la Puente Luna p. 123-149 À la fin du XVIè siècle, Felipe Guaman Poma de Ayala, s'impliqua dans une série de litiges judiciaires pour réclamer ses droits sur des terres proches de la ville de Huamanga. Il prétendait ainsi que ses parents (ses alliés dans ces actions en justice), avaient hérité ces terres de ses ancêtres nobles, Seigneurs de la totalité de la vallée de Chupas. Après de multiples inspections, pétitions et décrets, les officiers du Roi déboutèrent ses prétensions. Vaincu et humilié par l'accusation portée contre lui de plaider le faux, d'être un Indien du Commun et d'usurper la qualité de seigneur ethnique sur les terres qu'il réclamait, Guaman Poma se serait alors décidé à dénoncer ce type d'abus et bien d'autres, que l'on perpétrait contre les autochtones, dans sa fameuse Nueva corónica y buen gobierno. Ainsi posée, l'interprétation en vigueur nous amène à considérer que les terres en litige avaient bien pu en effet appartenir à ses ancêtres en tant que patrimoine familial exclusif et que donc, le chroniqueur se serait senti victime d'une spoliation typiquement coloniale : une alliance entre la Justice locale et ses adversaires légaux l'aurait privé, lui et les siens, de leurs terres ancestrales de Chupas. À l'encontre de l'interprétation qui a prévalu jusqu'à présent, cet article s'emploie à démontrer que, en tant que Seigneurs du village et de la vallée de Chupas, ce sont les ancêtres de Guaman Poma et leurs héritiers qui ont tiré parti des mécanismes d'appropriation des terres et pâtures communales typiques du Pérou colonial.In the closing years of the 16th century, Felipe Guaman Poma de Ayala pressed legal claims to a tract of lands near the city of Huamanga. According to his testimony, he and some relatives who were also his legal partners had inherited the lands from their noble ancestors, lords of the entire Valley of Chupas. After numerous inspections, petitions, and royal decrees, the local offcials dismissed Guaman Poma's claims. Having lost his «family» lands and humiliated by the accusation of being a humble Indian and a fake lord, Guaman Poma decided to denounce these and other abuses against the natives in his famous Nueva corónica y buen gobierno. Set forth in those terms, the current interpretation leads us to accept that the lands under litigation could in fact have belonged to his ancestors, and hence that the author and his family experienced a typical colonial dispossession in which the alliance of the local justice and the rival counterclaimants evicted the family from their ancestral lands in Chupas. I will argue instead that, as native lords of the town and Valley of Chupas, Guaman Poma's alleged ancestors and then their heirs participated in a typical process of appropriation of previously open common lands and pastures.
- Don Sebastián de Colán y Pariña y sus ancestros: caciques de dos pueblos de la costa del corregimiento de Piura (s. XVI-XVII) - Jorge Pável Elías Lequernaqué p. 151-161 Le cacique joua un important rôle dual au sein de la société coloniale qui se mit en place après la conquête : d'une part face à ses propres administrés, et de l'autre, face à l'autorité relevant du vice-roi à laquelle il devait rendre des comptes périodiquement. Ce travail rend compte d'une étude préliminaire portant sur le comportement des caciques du village de Colán (situé sur le littoral de l'actuel département de Piura au Pérou) durant les XVI et XVIIè siècles, dans le domaine social et économique.The cacique played a dual role in the viceregal society that was created after the Spanish conquest, mediating between his own population and viceregal officials who demanded a periodic accounting. The present work is a preliminary study of the social and economic behavior of the caciques of the population of Colan (an area situated on the north coast of the modern Department of Piura, Peru) during the 16th and 17th centuries.
- ¿Son todos caciques?* Curacas, principales e indios urbanos en Cajamarca (siglo XVII) - Aude Argouse p. 163-184 Au XVIIè siècle, malgré le principe de séparation entre les Indiens et les Espagnols, Cajamarca compte un tiers de ses habitants parmi les non-indiens. Dans ce qui est de facto une villa, alors qu'elle n'est sur le plan juridique qu'un pueblo de indios, autorités traditionnelles et pouvoir royal se partagent l'espace urbain et, symboliquement, occupent la Plaza Mayor. Les rapports qu'entretiennent les représentants locaux du Roi avec les caciques font apparaître une différence entre ces derniers, selon qu'ils descendent des autorités pré-hispaniques ou non, formant dans ce dernier cas un important réseau de percepteurs de l'impôt. Les caciques nobles de Cajamarca descendent de deux familles apparentées qui n'ont cessé de s'affronter depuis l'arrivée des Espagnols. Ces derniers jouent de cet antagonisme pour limiter le pouvoir des caciques. Les autres caciques se virent réduits, petit à petit, au rôle pénible de simple percepteur. Engageant leur responsabilité et leurs biens, ils ne bénéficient plus du prestige attaché à leur condition d'autorité traditionnelle.In the XVIIth century, in spite of the principle of separation between Indians and Spaniards, one third of the inhabitants of Cajamarca was non-Indian. In this de facto “villa”, formally a “pueblo de indios”, traditional authorities and royal power shared the urban space, and were symbolically situated on the central plaza. The relationships between the local representatives of the King and the caciques highlighted the differences between the caciques, according to their being noble or belonging to the important web of tribute collectors. The noble caciques of Cajamarca were descended from two families, albeit related to each other, that were pitted against one another with the arrival of the Spaniards, who took advantage of this hostility to restrict their power. In the meantime, the other caciques become mere tribute collectors, whose responsibility involved their own goods, lost their traditional prestige.
- De qadis y caciques - Karen B. Graubart p. 83-91
Tercera parte: La Colonia negociada
- Fronteras culturales difusas: autonomía étnica e identidad en textos andinos del siglo XVII - Alcira Dueñas p. 187-197 Cet essai analyse la notion de pouvoir ethnique, et les figures discursives de l'identité de l'identité que l'on trouve en bonne place dans deux textes andins du XVIIè siècle, de grande complexité, postérieurs aux oeuvres de Guaman Poma de Ayala et de Garcilaso de la Vega. En reprenant les principes de la scholastique médiévale, du « droit naturel », du « bien commun » et du « bon gouvernement », ces écrits souhaitaient légitimer le droit des sujets andins à exercer le gouvernement de leurs caciquats, dans la mesure où la domination espagnole au Pérou en avait transgressé les principes de base. Par la dénonciation des abus et du racisme perpétrés contre les Indiens, ces manuscrits soulignent les contradictions inhérentes au régime colonial, en particulier l'effet perturbateur des réformes de Toledo qui aggravèrent l'esclavage des Indiens et accentuèrent le déclin des caciquats andins. En se définissant comme « noble », « chrétien » et « loyal sujet », l'auteur andin cherchait à entamer une négociation culturelle avec la Couronne en vue d'obtenir le caciquat, d'accroître son autorité ethnique et son prestige social, tout en nous offrant une remise en cause précoce des hiérarchies sociales de la Colonie.This essay examines notions of ethnic power and discursive constructions of identity in two important Andean texts written after the age of Guaman Poma de Ayala and Garcilaso de la Vega»s works. Reworking scholastic medieval notions of «natural law», «common good», and «good government», these writings sought to legitimize the right of Andean peoples to rule their own political bodies given that Spanish rule in Peru transgressed basic notions of legitimacy. Criticizing the abuses and racism that Andeans were subject to, these manuscripts unmasked the inherent contradictions of colonialism, in particular the dislocating effect of the Toledan Reforms, which unleashed Indian slavery and the decline of Andean cacicazgos. Introducing himself as «noble», «Christian», and «loyal subject», the Andean writer attempted a cultural negotiation with the Spanish Crown to obtain a cacicazgo and carve new spaces of ethnic authority and social prestige, while advancing a reformulation of the racial hierarchies of colonialism.
- Vicente Mora Chimo, de «Indio principal» a «Procurador General de los Indios del Perú»: cambio de legitimidad del poder autóctono a principios del siglo XVIII - Sophie Mathis p. 199-215 À travers la trajectoire de Vicente Mora Chimo, descendant des caciques de la vallée de Chicama (Trujillo, Pérou), nous nous proposons d'observer comment le pouvoir autochtone redéfinit les fondements de sa légitimité, dans la première moitié du XVIIIè siècle. Cet « Indien principal » de Santiago de Cao devient Procureur Général des Indiens du Pérou depuis l'Espagne. En assimilant les règles de la justice coloniale pour défendre les Indiens, il se montra efficace et gagna la reconnaissance de ces derniers. Il sut agir de concert avec des magistrats créoles et Espagnols afin de présenter au Conseil des Indes un « Manifeste des préjudices, vexations et maux dont souffrent les Indiens du Pérou », en 1732. Grâce à son insertion dans des réseaux pluriculturels, Vicente Mora Chimo participe à la reformulation de la figure du cacique, en conciliant un héritage singulier avec les normes d'un système étranger.An analysis of the life of Vicente Mora Chimo, descendant of caciques settled in the Chicama valley (Trujillo, Peru), shows how the natives' autochthonous power acquires new bases of legitimacy in the first half of the XVIIIth century. This native Indian “principal” from Santiago de Cao becomes Attorney General of the Indians of Peru and rules from Spain. He proves highly effective in assimilating the rules of colonial justice in order to defend the Indians, and in this way earns their recognition. He interacts with Creoles or Spanish magistrates in order to present a «Manifesto of the offences damages, prejudices, humiliations, evils and troubles suffered by the Indians of Peru» to the Council of the Indies of 1732. By means of his insertion in multicultural networks, Vicente Mora Chimo participates in the reformulation of the figure of the cacique, reconciling a unique legacy with the norms of an alien system.
- La negociación de un compromiso: la mita de las minas de plata de San Agustín de Huantajaya, Tarapacá, Perú (1756-1766) - Anil Mukerjee p. 217-225 À l'exception des mines de Potosí et de Huancavelica, l'application du système de la mita dans les mines n'a pas connu un grand succès tout au long de la période coloniale. En 1758, la Couronne accorda un droit de mita au propriétaire de la mine d'argent de San Agustín de Huantajaya, Tarapacá, la seule zone minière de la Vice-Royauté qui n'était pas située dans les Andes. La possibilité de consulter le livre des registres du propriétaire de la mine, qui consignait l'échange parfois quotidien des lettres entre le propriétaire de la mine et les curacas, nous apporte une description beaucoup plus détaillée que d'habitude sur les négociations qui avaient lieu dans les mines où la mita était appliquée. Au lieu d'observer l'augmentation des contentieux politiques qui caractérisent cette période au Pérou, nous constatons une persistance des normes qui gouvernaient les relations entre les curacas et la société coloniale. De fait, grâce surtout aux efforts des curacas de Tarapacá, la mita de cette mine ne fut jamais appliquée et fut réattribuée à une tâche qui demandait un moindre effort que l'exténuant travail dans les mines.The implementation of the mining mita other than in Potosi and Huancavelica was never very successful during the colonial period. In 1758, the Spanish Crown awarded a mining mita to the owner of a silver mine in San Augustin de Huantajaya, Tarapacá, the only mining area in the viceroyalty that was not located in the Andes. The survival of a mine owner's registry book that recorded the sometimes daily exchange of letters between the mine owner and the kurakas permits a much more detailed view than is commonly available of the negotiations that took place when such mitas were implemented. Rather than seeing a rise in contentious politics that characterizes this period in Peru, we have a persistence of norms that governed kuraka relations with colonial society. Nevertheless, largely through the efforts of the kurakas of Tarapacá, this mining mita was never implemented and less strenuous tasks than the dreaded work in the mines were reassigned to the mita.
- El rol de los alcaldes de indios en las insurrecciones andinas (Perú a inicios del siglo XIX) - Joëlle Chassin p. 227-242 Les réformes bourboniennes modifient les structures du pouvoir local dès le milieu du XVIIIè siècle, et, plus encore au lendemain de la rébellion de Tupac Amaru. Les curacas ou caciques — autorités seigneuriales qui, jusque-là, constituaient les intermédiaires naturels entre les Indiens et l'État — se virent supplantées par des autorités élues : les alcaldes de indios. C'est sur cette figure du pouvoir que porte cet article, durant un contexte de conflit ouvert qui la met particulièrement en valeur. L'insurrection qui éclate en 1812 dans la région centrale des Andes, à Huanuco, est dite « menée par les alcaldes » et mobilise plusieurs partidos devenant « le point le plus critique du Vice-Royaume », de l'avis même du Vice-Roi Abascal : c'est là un terain de recherche privilégié. Comment s'effectue cette mobilisation ? Acteurs privilégiés, quel rôle jouent les alcaldes lors du conflit même ? Quelles relations entretiennent-ils avec leurs propres communautés, de communauté à communauté, entre eux ou avec les chefs insurgés créoles et les autorités vice-royales ? Quelles conduites adoptent-ils ? Quelles sont les manipulations ou pressions dont ils sont la cible ou dont ils usent ? Alors même que les curacas de sangre perdent leur autorité, c'est pourtant au nom de l'Inca, du « Roi Inca », que les communautés se rassemblent, alcaldes en tête, et c'est cette mémoire que les chefs créoles invoquent également pour entraîner les populations au combat. Déchirant le tissu social, la révolte apporte un éclairage direct sur le rôle de ces acteurs et sur la force des symboles.The structures of power, especially after the rebellion of Tupac Amaru, were modified as a result of the Bourbon reforms instituted in the second half of the XVIIIth century. The curacas or caciques, the native authorities that even today mediate between native commoners and the state, were replaced by elected officials, the native councilmen. This study discusses these power brokers. In order to better elucidate their characteristics, one open conflict is analyzed. This instance is the 1812 insurrection of Huanuco, which is famous for being led by the councilmen, who mobilized various parties, constituting, according to the Viceroy Abascal, in the «the most critical point of my Viceroyalty». How was this mobilization organized? What role did these most privileged councilmen assume? What relationships did they maintain with their own communities, between communities, among themselves, and with creole rebel leaders and viceregal authorities? What types of behavior characterized the councilmen? What were the manipulations and pressures brought to bear on them or that they used? Paradoxically, while the legitimate curacas lost their authority, the communities, led by the councilmen, merged in the name of the «Inca King» with the same memory that the creole leaders invoked to incite the population to fight. The rebellion that signified a tear in the social fabric sheds light directly on the role of these actors and on the significance of the symbols they employed.
- Fronteras culturales difusas: autonomía étnica e identidad en textos andinos del siglo XVII - Alcira Dueñas p. 187-197
Cuarta parte: El poder de la dignidad
- Alcaldes y Kurakas. Origen y significado cultural de la fila de autoridades indígenas en Pisac (Calca, Cuzco) - Beatriz Pérez Galán p. 245-255 Ce texte traite de l'origine et de la signification socioculturelle du système des autorités traditionnelles qui demeure en vigueur dans les communautés indiennes du district de Pisac (Calca, Cuzco). La mutation vécue par ces autorités indiennes y est envisagée comme une tentative de redéfinition de leur sens même et elle y est analysée dans son rapport au système héréditaire de caciquats ayant fonctionné durant toute l'époque coloniale. La célébration de la fête du Corpus dans le village de Pisac, fort ancienne et particulièrement liée aux Indiens, servira de fil conducteur à cette démonstration.This work discusses the origin and socio-cultural meaning of the system of traditional authorities present in the indigenous communities of the district of Pisac, Calca, Cuzco. It explores the revalidating historical process experienced by these Andean authorities and its relationship to the hereditary system of kurakazgos that was commonplace during the entire colonial period. The Corpus celebration in the town of Pisac, one of the oldest and most associated with the indigenous population of the Andes, is the thread that unites and illustrates this process.
- Don Víctor Huamán Reyes: el «cacique moral» de Cañaris - Pedro Alva Mariñas p. 257-270 Don Víctor Huamán Reyes, passé à la postérité comme « le cacique de Cañaris », semble tout droit sorti des livres d'histoire dans la mesure où l'autorité qu'on lui prête recouvre les aspects les plus divers de la vie des habitants de Cañaris. Il prend la relève de ses ancêtres en intervenant dans les problèmes importants de sa communauté, en prodiguant attentions et hospitalité à ses membres, en veillant à la continuité de certaines traditions communales, comme celle des danseurs, ou celle de l'entretien des chemins, ainsi que celle de la pratique des bonnes coutumes et de l'hospitalité envers les étrangers. Don Víctor a rempli de nombreuses charges officielles mais aussi traditionnelles. Il a donc évolué entre deux mondes comme la plupart des caciques coloniaux ; mais ce sont les charges traditionnelles et son rôle clé à l'occasion d'événements capitaux pour sa communauté qui lui ont valu de se voir conférer un statut d'autorité selon le canon andin. Don Víctor Huamán Reyes a l'aspect d'un simple paysan et ses signes extérieurs de richesse sont à peine visibles, mais l'on perçoit immédiatement qu'il jouit du respect et de la considération du plus grand nombre, des « siens » comme il a coutume de les appeler. C'est de là, vraisemblablement, qu'il tire sa richesse.Don Victor Huaman Reyes, recognized and called «the cacique of Canaris», is projected, through time, as a personage who comes straight out of the history books, because he assumes the leadership of various aspects of the lives of the people of Canaris. We see him as the protector of the ancestral legacy, intervening in the great problems of his community, dispensing attentions and hospitality to the people, watching over the communal traditions, among them, the dancers, the maintenance of the roads, and the practice of good customs and good treatment of outsiders. Don Victor served in various official capacities and also assumed various traditional responsibilities. In this respect, like the majority of colonial caciques, he moved between two worlds; nevertheless, the traditional responsibilities and the fact that he was the protagonist in various transcendent events for his community made him a significant Andean authority. Don Victor Huaman Reyes looked like a simple peasant and his outward signs of wealth were hardly perceivable, but one quickly notes that he enjoyed the respect and consideration of many people, of «his people» as he was accustomed to say. Perhaps, the people were his wealth.
- Alcaldes y Kurakas. Origen y significado cultural de la fila de autoridades indígenas en Pisac (Calca, Cuzco) - Beatriz Pérez Galán p. 245-255