Contenu du sommaire : Antoine Meillet et la linguistique de son temps
Revue | Histoire, Epistémologie, Langage |
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Numéro | vol.10, n°2, 1988 |
Titre du numéro | Antoine Meillet et la linguistique de son temps |
Texte intégral en ligne | Accessible sur l'internet |
Antoine Meillet et la linguistique de son temps. Sylvain Auroux [Dir.]
Avant-propos
- Sylvain Auroux p. 5-7I. Questions de Méthode
- La méthode comparative de Meillet : statut et légitimité des reconstructions - Marie-José Reichler-Béguelin p. 11-24 Le présent article aborde le problème de la méthode comparative de Meillet indo-européaniste, et plus précisément la question du statut épistémologique accordé aux entités reconstruites. Pour Saussure par exemple, qui fut le maître de Meillet, la comparaison n'a de raison d'être que si elle débouche sur des reconstructions, légitimées par leur propre régularité morphologique interne ; Meillet privilégie au contraire l'étape de la comparaison et voit dans les rapprochements de langue à langue la seule positivité, le seul lieu où il soit possible au diachronicien d'« administrer la preuve », d'élaborer une démonstration scientifique véritable.The present article deals with A. Meillet's comparative approach in Indo-European studies and, more specifically with the epistemo logical status granted to reconstructed entities. According to Meillet's teacher Saussure, comparisons make sense only if they lead to reconstructions that are justified by their internal morphological regularity. Meillet, however, gives preference to the act of comparison itself. He finds in the mutual "rapprochement" of languages the only field of positive research, the only area where a diachronist can adduce evidence and make an original contribution to linguistic studies.
- Antoine Meillet et la sémantique - Simone Delesalle p. 25-35 Cet article considère le rapport d'Antoine Meillet à la Sémantique, singulièrement à la lumière de son article « Comment les mots changent de sens » paru en 1906 dans Y Année Sociologique. On y confronte les positions de l'auteur avec les thèses de Darmesteter et de Bréal et on y évalue ses appréciations à leur sujet. On s'interroge sur la validité d'une vision sociologique des changements de sens et on analyse les divergences d'interprétation entre Meillet et Bréal en ce qui concerne l'ellipse, la contagion, la polysémie. Meillet ne s'est-il pas intéressé finalement aux causes des changements plus qu'à leurs modes, et au domaine lexical plus qu'au domaine sémantique ?This article deals with Meillet's relationship with Semantics, especially with respect to his article "Comment les mots changent de sens", published in 1906 in V Année Sociologique. It compares Meillet's ideas with those of Darmesteter and Bréal and evaluates whether it is valid or not to have a purely sociological view of meaning change, and analyses the differences of interpretation between Meillet and Bréal with respect to ellipsis and polysemy. Was not Meillet, finally, more interested in the cause of meaning change than in the processe of meaning change, and more interested in the lexical field than in the semantic field ?
- La notion de linguistique générale - Sylvain Auroux p. 37-56 On doit s'étonner de ce que Meillet puisse présenter l'idée d'une linguistique générale comme une nouveauté dans son cours de 1906. Le thème, en effet, était bien établi depuis le début du dernier tiers du XIXe siècle. En analysant les conceptions fragmentaires qu'il a développées à ce sujet, on s'aperçoit qu'il envisageait une discipline ayant pour objet la connaissance de lois universelles. Cette conception était bien une nouveauté, largement incompatible, tant avec le comparatisme de type néogrammairien qu'avec les idées développées par Saussure.It is surprising that in his lectures of 1906 Meillet presented the idea of general linguistics as a novelty. For this idea had already been established during the last thirty five years of the XIXth century. By analyzing the fragmentary conceptions he developped about the subject, we see that he aimed at a discipline whose object would be knowledge of universal laws. This asumption was novel, in fact, being incompatible with the comparativism of the neo-grammarians as well a with Saussure's ideas.
- La notion de linguistique générale - Sylvain Auroux p. 37-56
- Meillet, Saussure et la linguistique générale - Konrad Koerner p. 57-73 RÉSUME : La biographie de Meillet indique qu'il était élève de Saussure à l'École Pratique des Hautes Études à Paris pendant les années 1885-89 et qu'il le remplaça durant l'année 1889-90 lorsque celui-ci prit un congé d'un an. Nous savons, de plus, que même après que Saussure eut accepté un poste de professeur en grammaire comparée à Genève en 1891, les deux hommes restèrent en contact. La série de lettres adressées par Saussure à Meillet qui a été retrouvée témoigne de l'amitié qui existait entre ces deux érudits. Mais ce qui est plus important, c'est le rapport entre Meillet et Saussure dans le domaine de la linguistique générale : l'influence de Saussure sur Meillet reconnue par ce dernier d'une part, et l'influence possible de certaines idées de Meillet sur la théorie linguistique de son ancien maître, d'autre part. Dans cet exposé, je reverrai en premier lieu la production scientifique de Meillet en ce qui concerne l'évolution de ses idées dans le domaine de la linguistique générale par opposition à ses travaux en linguistique historique et comparée. J'aborderai ensuite la question de l'impact de certaines observations de Meillet sur l'enseignement de la linguistique générale de Saussure durant les années 1907-1911. La bibliographie de Meillet démontre que celui-ci oeuvrait presqu'exclusivement dans le domaine de la linguistique indo-européenne, même si l'on note son intérêt pour des questions de méthode et de théorie générale dans la recherche scientifique. Cet intérêt théorique se révèle davantage dans ses comptes rendus ou ses articles destinés à une audience moins spécialisée que dans ses livres dont la plupart sont consacrés à des langues ou des groupes de langues de la famille indo-européenne. Il reste cependant que Meillet insistait souvent sur le caractère systématique et social du langage - points de vue partagés par Saussure. Toutefois, la réaction de Meillet vis-à-vis du Cours de linguistique générale publié par Charles Bally et Albert Sechehaye suggère que, pour Meillet, Saussure demeurait avant tout l'auteur du Mémoire sur le système primitif des voyelles dans les langues indoeuropéennes de, 1878.Meillet was a student of Saussure's at the École Pratique des Hautes Études in Paris during 1885-89, substituting for him during 1889-90, when Saussure took a sabbatical leave. Following Saussure's acceptance of a professorship at the University of Geneva in 1891, Meillet remained in touch with him ; letters by the latter addressed to Meillet attest to their friendship. Meillet, for his part, never tired to acknowledge his debt to Saussure ; by contrast, his influence on his former teacher with regard to general linguistic ideas is much less certain. The present paper addresses this question as well as the traditional claim that Saussure was influenced by Durkheimian sociology, most probably mediated by Meillet Throughout most his his career Meillet made general observations about the nature of language and linguistic methodology. But these are usually expressed in book reviews and few papers ; all studies of his of book length are devoted to languages or language groups of the Indo-European family, and it is evident that Meillet remained a comparativist. A close analysis of Meillet's general linguistic ideas reveals that he usually stated the obvious at least if compared with what Saussure had to say about the foundations of linguistics, and that there is little that Saussure could have found in Meillet as a generalise It is therefore not surprising that Meillet's reaction to the Cours de linguistique générale was much less favourable than one might have expected ; for Meillet, Saussure remained first and foremost the author of the Mémoire sur le système primitif des voyelles, which appeared in Leipzig in 1878.
- Fait social et fait linguistique : A. Meillet et F. de Saussure - Christian Puech, Anne Radzynski p. 75-84 La comparaison Saussure/Meillet à propos du caractère social des faits linguistiques met en évidence deux conceptions très différentes de la généralité en linguistique. Si chez Meillet la socialite de la langue renvoie à la diversité historique des causes externes et conduit à l'idéal d'une science « générale » du langage de type anthropologique et encyclopédique, chez Saussure, le caractère interne de la socialite linguistique, en focalisant le point de vue sur le principe de V arbitraire, conduit à une généralité sans généralisation et à l'inclusion paradoxale, complexe et prospective de la linguistique dans la sémiologie.Comparing Saussure and Meillet with respect to the social character of linguistic facts reveals two very different conceptions of generality in linguistics. With Meillet, the social aspects of language refers to the historical diversity of external causes, thus leading to the ideal of a "general" science of language, that is anthropological and encyclopedic ; whereas, with Saussure, by focusing on the arbitrary, the internal character of language's social aspects leads to a generalness without generalisation and to the paradoxical, complex and prospective inclusion of linguistics within semiology.
- Le débat Schuchardt / Meillet sur la parenté des langues (1906-1928) - Daniel Baggioni p. 85-97 Dans la polémique qui l'oppose à Antoine Meillet avant, pendant et après la première guerre mondiale sur le problème de la « parenté des langues », c'est un peu le même drame qui se joue trente ans auparavant lors du « clash » avec les néogrammairiens (1880). Schuchardt a bien du mal à se faire comprendre de quelqu ' un pour qui sans une résistance à la diversité, les sujets tendraient à ne plus se comprendre entre eux. Certes le maître français du comparatisme historique a cherché à comprendre le « maître de Graz ». Mais lorsqu'il situe l'objet de la recherche de Schuchardt, dans la « Parole », ne le repousse-t-il pas dans les marges de la discipline à l'intérieur d'une problématique que le contestataire des confins de l'empire austro-hongrois refusait justement ?The polemics that opposes H. Schuchardt and A. Meillet during the years before, after and during World War I, over the problem of relatedness between languages can be compared to that other dramatic "clash", when Schuchardt challenged the neo-grammarian positions in 1880. It was certainly impossible for all those who maintained that intercomprehension implied resistance to language diversity to comprehend his point of view. Surely, the great French specialist of historical comparatism sought to understand the "maître de Graz", but by placing the object of Schuchardt' s research within the domain of "la parole" and thus at the marge of the discipline, he reestablishes a division and re-creates just those problems that Schuchardt refused to recognize as being relevant in linguistics.
- Meillet : langue et parole - Brigitte Nerlich p. 99-108 Meillet et Saussure, le créateur des deux concepts étudiés ici, avaient des intérêts scientifiques différents. L'un a voulu étudier les langues et les parlers, l'autre a voulu clarifier la terminologie linguistique. A partir de 1894 environ, ils ont poursuivi leurs programmes de recherche dans une sorte de division de travail tacite. Ce n'est que vers 1 928 que Meillet a pleinement accepté la nouvelle conception de la linguistique et des deux termes langue et parole introduits par Saussure.Meillet and Saussure, the creator of the two concepts studied in this article, have had quite different scientific interests. The former wanted to study languages and dialects, the latter wanted to clarify linguistic terminology. From about 1 894 onwards they pursued their research programs in some sort of tacite division of labour. It was only by 1928 that Meillet finally accepted the new conception of linguistics and of the two terms langue and parole introduced by Saussure.
- Histoire et Structure - Jacques-Philippe Saint-Gérand p. 109-125 Cet article constitue un essai d'analyse du fonctionnement sémantique de deux termes employés largement par Meillet, et souvent mésinterprétés par défaut d'observation précise de leurs conditions contextuelles d'emploi. En prêtant attention à ces dernières, on voudrait préciser les valeurs qu'il convient d'accorder à « structure » et « histoire » dans la pensée de Meillet.This paper is an attempt to analyse the meaning of two lexical items in Meillet's linguistics works. "Structure" and "Histoire" are often misunderstood because of the unacurate acuteness of contemporary scholars. It should be an improvement of our knowledge of the development of linguistics ideas in earlier xxth century France to detail the ways of contextualizing these lexical items according to Meillet's conceptions.
- Le soleil et la lune, l'eau et le feu selon Meillet : De la grammaire comparée à l'anthropologie - Françoise Létoublon p. 127-139 Antoine Meillet est revenu à plusieurs reprises au cours de sa carrière sur le problème du genre grammatical, entre 1904 et 1931. Son analyse amenant à affiner la définition de l'arbitraire du signe linguistique ne semble rien devoir sur ce point à l'enseignement de Saussure, mais doit s'expliquer par d'étroites affinités avec l'École de Paris de Y Année sociologique, en particulier Lévy-Bruhl, à qui Meillet doit peut-être aussi certaines limites de son anthropologie. Partant de la notion d'arbitraire du genre, nous analysons en détail les textes de Meillet sur la question, puis les replaçons dans le contexte culturel de la première moitié du xx* siècle : en prenant conscience des limites de son analyse par rapport à ses contemporains, linguistes et sociologues, nous pensons mieux dégager l'originalité de Meillet et le caractère novateur de son apport.In the course of his career, A. Meillet dealt several times, from 1904 to 1931, with the problem of grammatical gender. Since his analysis owes nothing to Saussure 's definitionof the linguistic sign conceived as arbitrary, from S's teaching, but from his close contact with the French school of L'Année sociologique, particularly Lévy-Bruhl, whose influence may also account for the limitations of his anthropology. Starting from the common notion of the arbitrary of gender concerning non-sexual beings of the world, we analyze Meillet's texts about this question ; then we try to relate them to the intellectual context of the first half of the xxth century, in order to see the limits of Meillet's ideas as compared to his contemporary linguists and sociologists. We may thus be able to better evaluate how far Meillet was original and innovative.
- Meillet, Benveniste et l'ethnolinguistique - Aurore Monod-Becquelin p. 141-153 L'influence de la pensée de Meillet dans le domaine des relations entre la langue et la culture apparaît moins sans doute dans ce qu'on appelle l'ethnolinguistique en France que dans le travail des indo-européanistes qui, par les voies de la grammaire comparée ou de la mythologie comparée, mettent en perspective la langue dans son fonctionnement et cherchent à reconstruire le tissu des fonctions sociales et des comportements culturels. Benveniste et Dumézil ont, sur ce problème, des positions parfois inverses de celles de Meillet, les anthropologues et les ethnolinguistes également, mais elles participent de la même préoccupation sociologique. Chez Meillet, cette réflexion est parfois voilée sous un vocabulaire d'époque (évolutioniste, normatif) qui en masque l'intérêt et la rigueur scientifique, mais elle est prodigue en conceptions fines et en programmes encore inaccomplis de nos jours.For relation between language and culture, Meillet's ideas appear less influential on what is called in France ethnolinguistics than on Indo-European research, which through comparative grammar and mythology place language in the context of its use and attempt to reconstruct the network of social and cultural practices. On this same problem, Benveniste and Dumézil have developed positions that may sometimes be opposed to those of Meillet, as have other anthropologists and ethnolinguists. Nevertheless they share the same general sociological concern. For Meillet, this reflection is sometimes masqued by a terminology outdates (evolutionary and normative) which partially conceals its interest and scientific closeness. But it provides a wealth of subtle conceptions and projects some of which have not yet been completed.
- Le problème du changement linguistique dans l'œuvre d'Antoine Meillet - Pierre Swiggers p. 155-166 Quoique Meillet n'ait jamais formulé une théorie unifiée du changement linguistique, on trouve chez lui des réflexions intéressantes à propos du développement linguistique. La position théorique de Meillet à ce propos est ambiguë en ce sens qu'il oscille entre une conception du changement en tant que correspondance entre deux états temporels d'une langue et une conception du changement en tant qu'évolution en cours. Cette ambiguïté (ou tension) sera résolue dans le sens d'une visée historique sur la variations des langues, déterminée par des tendances qui jouent dans un contexte social. De cette façon, les réflexions de Meillet à propos du changement linguistique - réflexions qui témoignent elles aussi d'une évolution dans la pensée de l'auteur - se détachent graduellement de la théorie néo-grammairienne, par l'importance accrue donnée aux facteurs d'hétérogénéité (par ex. le bilinguisme) dans les communautés linguistiques.Although Meillet never formulated a comprehensive theory of language change, he provides interesting reflections on language evolution. Meillet's theoretical stand is rather ambiguous : he wavers between change as a correspondence between two chronological stages in the history of a language, change as a change in progress. This ambiguity (or tension) is resolved by a move towards a historical view of linguistic variation, as it is determined by tendencies that operate in a social context In this way Meillet's ideas on the nature of linguistic change - and we notice an evolution in his thought - have gradually moved away from the Neogrammairian theory, because of the increasing weight given to factors of heterogeneity within linguistic communities (e.g. bilingualism).
- Antoine Meillet devant la formation des mots par composition - Kathryn Klingebiel p. 167-175 Antoine Meillet fait preuve d'une attitude tout à fait sienne devant la formation des mots par composition. Il sait que certains compoés semblent être des phrases en raccourci, que d'autres composés continuent des états de syntaxe archaïques. Dans l'ensemble pourtant, il envisage la composition comme un procédé expressif, artificiel et peu usuel, typique de la poésie et des langues spéciales. Meillet est loin d'être générativiste avant l'heure ; il n'établit jamais de dépendance directe entre composition et syntaxe. Dans son œuvre se trouve l'intégration des optiques internes et externes, par un mélange d'éléments linguistiques et sociologiques qui permet de cerner les « comment » et les « pourquoi » de la composition.Antoine Meillet's approach to compounding proves to have been wholly his own. He agreed with earlier scholars that some products of the compositional process appear to derive from whole clauses, while other compounds represent archaic syntactic structures. Yet he approached compounding as an expressive process, artificial, and essentially typical of poetry and special applications rather than of the spoken language. Far from establishing a direct dependence of compounding on syntax, his work combines an internal with an external view of this word formation process, mixing linguistic and sociological elements to explain the "how" and the "why" of compounding.
- L'étymologie - Yakov Malkiel p. 177-184 Outre sa collaboration au Dictionnaire Étymologique de la langue latine, les travaux étymologiques de Meillet sont assez nombreux mais dispersés, bien souvent dans des comptes rendus ou de multiples notes étymologiques. Il concevait l 'étymologie comme l'histoire des mots, et il a certainement eu une influence dans ce domaine sur certains de ses élèves, comme Benveniste.Besides collaborating on the Dictionnaire Étymologique de la langue latine, Meillet produced numerous studies on etymology, which are widely dispersed, often in reports or notes. He conceived etymology as the history of words, and surely in this field influenced certains of his students, like Benveniste.
- La méthode comparative de Meillet : statut et légitimité des reconstructions - Marie-José Reichler-Béguelin p. 11-24
II. Les langues du monde
- Antoine Meillet et Les langues du monde (1924) - Michel Dessaint p. 187-194 L'auteur a voulu montrer que "Les langues du monde"s'inscrivent dans une ancienne tradition européenne, inaugurée à la Renaissance, de Polyglottons et de Catalogue des Langues de la Terre, dont le plus remarquable lui paraît être, d'un point de vue linguistique, celui de Lorenzo Hervâs y Panduro. Par ailleurs, malgré les intentions de MeiUet, qui voulait fonder son ouvrage sur la méthode historique, on s'aperçoit que la science linguistique est encore incapable de classer toutes les langues du monde sous cette seule perspective et qu'elle doit souvent se contenter d'une présentation moins sophistiquée.I have here tried to show that Les langues du monde forms part of an ancient European tradition, beginning in the Renaissance, "catalogues of All the Languages of the Earth". Of these, to Meillet, the most remarkable from a linguistic point of view seems to be that of Lorenzo Hervâs y Panduro. Besides, in spite of Meillet's intentions, to base his work upon the historical method, we see the linguistic science is still unable to classify all the languages of the world according to this method alone and has often to be content with a less sophisticated presentation.
- Langue et Nation - Pierre Caussat p. 195-204 En abordant le problème des nations et des nationalités, Meillet rencontrait l'actualité, ce qui n'est pas sans péril. Pour le linguiste, la langue suppose la nation. Mais tous les cas de figure sont possibles dans l'histoire qui va d'un peuple naissant jusqu'à la nation constituée, ce qui conduit le praticien à des prises de position qui excèdent probablement les conclusions qu'il peut légitimement tirer de sa discipline.To deal with the problem of nations and nationalities, as Meillet did, was not without its dangers. For the linguist a language presupposes a nation. Yet in history the possibilities range from the birth of a people to the established nation. This loads the linguist to adopt positions that probably go beyond the conclusions he can logically draw from within his disciplines.
- Antoine Meillet et les langues romanes - Hava Bat-Zeev Shyldkrot p. 205-215 II est communément admis que Meillet fut avant tout un comparatiste. On tente de démontrer ici que Meillet avait des opinions bien déterminées à l'égard de tous les grands courants du romanisme à son époque, et que même si sa contribution au domaine roman ne consistait qu'à suivre ces courants, et à se prononcer de manière non hésitante et univoque sur les problèmes traités, cette contribution est loin d'être négligeable.It is commonly agreed that Meillet was above all a comparative linguist. I show here that Meillet had unequivocal opinions concerning all major trends in Romance linguistics of his time even if his contribution to this field had not gone beyond closely following those trends and voicing his own unhesitant ideas regarding the problems under discussion, this contribution would have been far from negligible.
- Meillet et l'Arménien - Charles de Lamberterie p. 217-234 Véritable « domaine de prédilection » de Meillet, l'arménien occupe une place particulière dans l'activité scientifique de ce savant : contact avec le pays, prise en compte des données modernes, études de nature strictement philologique permettant une interprétation exacte des faits de langue. On se propose de donner ici la mesure de cette œuvre immense, bien plus considérable que ne le laisseraient croire les recueils, fort incomplets, où elle est rassemblée. On étudie en détail un problème de phonétique historique exemplaire pour la méthode comparative : il s'agit du traitement i.e. * dw- > erk-, dit « loi de Meillet », que l'on entreprend de justifier en restituant et en apportant de nouveaux exemples.Meillet's favourite field of study, Armenian has a special position in this scientist's activity : contact with the contry, taking into account the most recent data, and studies of a purely philological nature, which enable him to interpret language facts precisely. I here propose to evaluate this vast work which is much greater than the incomplete compilations containing it would lead us to believe. I deal in detail with a problem in historical phonetics which is exemplary for the comparative method : the indo-european *dw- > arm. erk-, called Meillet's law, which we try to comfirm by restoring intermediate states and introducing new examples.
- Meillet, Greek and the Aperçu - Anna Morpurgo-Davies p. 235-252 Meillet n'était pas en premier lieu un philologue classique et son œuvre couvre un grand nombre de domaines inexplorés avant lui. L'un de ses ouvrages qui remportèrent le plus de succès est son Aperçu d'une histoire de la langue grecque (1913), bien qu'il traitât d'un sujet déjà ancien et n'ait pu que peu contribuer à présenter de nouveaux matériaux. Il y a là un paradoxe qu'on se doit d'expliquer. En fait, Y Aperçu est un ouvrage d'avant-garde : nonseulement il s'agit de la première histoire du grec qui ait quelque envergure, mais c'est aussi l'une des toutes premières histoires d'une langue. L'étude des innombrables comptes rendus rédigés par Meillet, comme celle de ses articles plus généraux, montre pareillement que Y Aperçu est une sorte de « roman à thèse » où l'on trouve une démonstration concrète des théories générales de Meillet, révélant à la fois leur force et leur faiblesse.Meillet was not primarily a classicist and his work ranged over a large number of unexplored fields. Yet, one of his most successful books was the Aperçu a" une histoire de la langue grecque (1913), though this dealt with an old field of study and could contribute little in the way of new original material. There is an oddity here which must be explained. In fact the Aperçu is pioneering work not only as the first significant history of Greek but also as one of the first ever histories of a language. A study of Meillet's innumerable reviews and of his more general articles also shows that the Aperçu is a sort of roman à thèse where Meillet's general theories are given a concrete demonstration, thus revealing both their strength and their weaknesses.
- Antoine Meillet, slaviste - Jacqueline Fontaine p. 253-254 Dans Le slave commun, gros ouvrage qui a assis la réputation de Meillet comme slaviste, la reconstruction de cette langue entraîne un enchaînement de substitutions d'un état linguistique à un autre, tout en maintenant l'indifférenciation des langues à l'intérieur du groupe slave. Ce qui reste surtout de l'œuvre de Meillet slaviste est dû au souci d'exigence critique propre à une saine philologie. D'autre part, il faut évoquer le rôle de maître à penser qu'a endossé Meillet, spécialement dans le milieu des slavistes à cause des charges officielles qu'il y a exercées.In the « Common Slavonic », a big work which established Meillet's reputation as a slavist, the reconstruction of this language entails a chain of substitutions of one state of language for another, while preserving the non-differenciation of the idioms within the Slavonic group. What remains chiefly of Meillet's works in the field of Slavistic is due to his care for critical accuracy proper to good philology. We must also mention the part he plaid as an intellectual authority, especially among slavists, thanfs to the official duties he carried out in these circles.
- Meillet et les faits slaves : à propos de l'évolution des formes verbales du prétérit simple - Zlatka Guentchéva p. 265-274 Dans un grand nombre de textes consacrés au domaine slave, A. Meillet insiste particulièrement sur la notion de vieux slave. L'article vise à étudier les arguments avancés par l'auteur pour cerner cette notion, et à partir de là, à évaluer l'analyse proposée pour expliquer l'évolution du prétérit simple et composé dans les langues slaves. Il apparaît que la méthode historico-comparative a ses limites et qu'une forme grammaticale tout en suivant les tendances morphologiques générales de l'indo-européen, a sa spécificité et des fonctions précises qui s 'expliquent uniquement à l'intérieur du système dont elle fait partie.A. Meillet wrote a number of texts about Slavonic languages, where the notion of Old Slavonic plays a central role. This article aims at evaluating the way he defines it, focusing on one particular problem, the evolution of simple and compound preterites in Slavonic languages. I show that the comparative methods find his limits and that a grammatical form which follows the general morphological trends of Indo-European still has a specific features which can only be explained within the system of which it is a part.
- Antoine Meillet et Les langues du monde (1924) - Michel Dessaint p. 187-194
III. Le savant dans le monde
- Meillet, the Researcher and the Teacher - Karl Krippes p. 277-283 Dans la préface de son livre Le Langage (1923 : 13), Vendryès remarque que pour écrire un traité complet sur le langage, on aurait à étudier toutes les langues de la terre. Alors qu'un tel linguiste idéal est introuvable, Vendryès pense que nombreux, parmi ses contemporains, sont ceux qui auraient été capables de nommer quelqu'un approchant cet idéal - se pourrait-il qu'il se réfère à son maître, Antoine Meillet ? Ce dernier en effet était parvenu à dominer les principales langues représentatives de la famille indo-européenne. Cette connaissance lui conféra une immense perspicacité dans ses ouvrages de linguistique générale, comme de linguistique indo-européenne. Meillet était plus qu'un comparatiste de premier plan, c'était un chercheur et un professeur. Cet article explore ce triple aspect de la vie de Meillet.In the preface to Le Langage (1923 : 13), Vendyrès remarks that in order to write a complete treatise on language, one would have to study all the known languages on earth. And while such an ideal linguist cannot be found, Vendryès thinks that most of his contemporaries would be able to choose someone who approximated this ideal. Could he have been referring to his teacher, Antoine Meillet ? Meillet succeeded in commanding the major representative languages of the Indo-European family, knowledge which gave him his immense insight in his writings on general and Indo-European linguistics. But Meillet was more than a first-rate comparativist, he was a researcher and a teacher. This article will explore these three aspects of Meillet's life.
- Meillet et son disciple japonisant Hagenauer - Masako Villard p. 285-293 Antoine Meillet (1866-1936) fut avant tout un comparatiste et son œuvre entière constitue un modèle d'application de sa méthode. L'un des rares japonisants du début de ce siècle, Charles Haguenauer ( 1 896-1976) fut formé à l'école d'Antoine Meillet dans le domaine de la linguistique. A travers ses connaissances philologiques, ses principes de rigueur, son utilisation des faits dialectaux et des parlers locaux dans leurs rapports réciproques avec une langue commune, ses applications d'une linguistique sociologique et ses études de l'étymologie du vocabulaire, on voit combien Charles Haguenauer doit, dans ses études, à l'enseignement d'Antoine Meillet.Antoine Meillet (1866-1936) was above all a specialist in comparative linguistics and his entire work constitutes a perfect example of the application of his method. Charles Haguenauer (1896-1976), one of the few japonologists in the beginning of the century, was a disciple of Antoine Meillet in linguistic studies. Through Charles Haguenauer's philological knowledge, principles of rigour use of dialectical phenomena and local speech in reciprocal relation to a communal language, applications of a sociological linguistic and studies of vocabulary's etymology, we may see how much his linguistic studies owe to Antoine Meillet's teaching.
- Deux lettres inédites d'Antoine Meillet à Lucien Lévy-Bruhl - Louis Deroy p. 295-299
- Antoine Meillet et les langues de l'Europe : l'affaire hongroise - Jean Perrot p. 301-318 L'ouvrage de Meillet Les Langues dans l'Europe nouvelle (V éd. 1918, 2e éd. 1928) fait du hongrois et de la Hongrie une présentation très négative : le hongrois est une langue compliquée, pleine d'emprunts, trop européanisée pour être proteuse d'une civilisation originale ; maintenue au cours de l'histoire par une oligarchie dominatrice, cette langue est condamnée à la disparition dans le monde nouveau. Ce tableau a suscité une réplique très acerbe du grand écrivain hongrois Kosztolânyi. On tente ici d'interpréter les vues de Meillet en fonction du système d'idées qui a déterminé ses prises de position politiques et linguistiques.In his work Les Langues dans l'Europe nouvelle (1" éd. 1918, 2nd éd. 1928), Meillet presented the Hungarian language and nation in a very negative way : Hungarian is a very difficult language, full of borrowings, and too deeply influenced by European languages to be the bearer of an original civilization. Preserved in the past by a dominating oligarchy, it is bound to disappear in the new world. Such a picture provoked a biting reply from the great Hungarian writer Kosztolânyi. The present paper aims to explain MeiUet' s views with respect to his general ideas about the evolution of peoples and languages.
- Ce que les savants allemands doivent à Antoine Meillet - Jean Rousseau p. 319-335 Apprécier le traitement réservé par Antoine Meillet à deux pères fondateurs de la linguistique suppose un examen préalable de la querelle du substrat qui a conduit, à tort, les linguistes allemands à suspecter ses positions d'être guidées par un sentiment patriotique déplacé. A propos de Bopp, Meillet explique à la fois l'essor de la grammaire comparée et les limites de ses thèses par les présupposés romantiques organicistes ; mais on pourra repérer aussi dans ses propres analyses une vision non réfléchie du primitif. De même, le reproche adressé à Humboldt de tenir la langue pour une manifestation de l'activité psychique de chaque nation, Meillet pourrait lui aussi l'encourir par ses usages discutables d'une volonté des sujets parlants, ou de leur « mentalité ». Cet examen est donc l'occasion de révéler dans la propre théorie de Meillet une part d'ombre peut-être inhérente à toute pratique comparative.In order to appreciate Meillet's judgement about two linguistics founding fathers we must examine the substratum controversy. Meillet's position on this matter lead, wrongly, German linguists to suspect him of chauvinism. In the case of Bopp, Meillet explains both the impetus of comparative grammar and its drawbacks by romanticist and organicist biases. But in Meillet's own works, we also fond a rather naïve primitivism. Again, when Meillet objects to Humboldt' s view of language as a mirror of the psychologic character of a nation, he could be accused of the same, when he speaks of the "will of the speakers" or their "mentality". This historiographie survey thus hopes to unveil hidden prejudices that may be inherent in all comparative research.
- Meillet, the Researcher and the Teacher - Karl Krippes p. 277-283
IV. Conclusions
- Meillet et les sciences humaines de notre temps - Jean Loicq p. 339-348