Contenu du sommaire : Enseigner, apprendre et chercher à l'université en temps de pandémie

Plusieurs indicateurs laissent à penser que les contraintes dues à la pandémie de covid-19 et les préoccupations sanitaires que celle-ci a générées ont renforcé l'influence latente sur le curriculum d'une tradition d'enseignement de l'éducation physique (EP) comme éducation à la santé, au détriment d'autres finalités et contenus de cette discipline scolaire. Dans la première partie de cette contribution, nous décrivons l'enseignement de l'EP dans le canton de Genève, en Écosse, en France et dans la province de Québec durant la première vague de la pandémie. Cette description témoigne effectivement d'un resserrement du curriculum autour de la promotion de l'activité physique et la santé. Dans la seconde partie, nous discutons des enjeux et risques liés à l'éventuelle pérennisation, dans le monde d'après, des manières d'enseigner l'EP qui ont émergé dans l'urgence durant cette première vague. Ceux-ci concernent (a) une EP sanitaire, (b) une EP externalisée, et (c) une EP uniformisée.

Dans une situation comme celle de la pandémie de covid-19, que se passe-t-il dans les cours d'instrument et de chant, eu égard aux contenus d'enseignement techniques et interprétatifs ? Comment les enseignant·e·s modifient-ils/elles leurs pratiques, dans la construction du rôle d'interprète instrumentiste/chanteur/chanteuse ? Quels aménagements des milieux didactiques ont été trouvés pour que l'interprétation puisse, malgré les restrictions liées aux mesures sanitaires prises par les autorités politiques, être un objet enseigné ? L'enseignement de l'interprétation a-t-il été poursuivi ou bien a-t-il été esquivé ? Telles sont les questions à l'origine de notre recherche. Les réponses de 28 enseignant·e·s et de 42 élèves aux questions qui leur furent posées – durant ou après le confinement – tentent d'apporter une contribution à une réflexion sur la transmission de savoirs étroitement associés à des modes de corporéité spécialisés et à des définitions de l'interprétation spécifiques à la musique.

Cet article porte sur la notion de situation d'énonciation et l'envisage tour à tour comme objet de savoir linguistique, comme objet d'enseignement et de formation, puis comme outil de réflexion et de formation en contexte universitaire. Ce regard multiple sur une notion linguistique sert à exemplifier la manière dont l'enseignement à distance provoqué par la crise sanitaire a suscité la transformation d'un objet d'enseignement en instrument, lui conférant le statut d'outil réflexif au service de la compréhension de la situation traversée, ainsi que le statut d'instrument de formation. Le va-et-vient entre situation d'énonciation comme objet de savoir, comme outil de réflexion et comme expérience en cours permet d'illustrer la dynamique des interactions entre ces différentes facettes, conduisant à une meilleure compréhension du caractère processuel des savoirs enseignés.

Cet article porte sur l'enseignement à distance et son traitement en formation initiale des enseignant.es secondaires spécialistes des arts visuels. Nous nous focalisons ici sur le rapport aménagement des tâches – accompagnement et l'évaluation du travail des élèves, pour dégager certains déplacements d'ordre professionnel survenus chez les stagiaires, suite à l'adaptation de leur agir aux contraintes du distanciel. Nos analyses permettent d'affirmer que si l'outillage de l'autonomie et de la créativité attendues des élèves, tout comme l'adéquation contrat didactique–évaluation, restent des points d'effort pour les stagiaires, en revanche l'impossibilité d'un encadrement interactif synchrone du travail des élèves les amènent à réfléchir davantage aux implications didactiques d'un certain aménagement du milieu pour l'étude. Nous illustrerons notre propos en présentant un des enseignements observés et analysés dans le cadre du suivi d'étudiant.es en première année de formation.

Cette contribution témoigne à la fois de l'expérience de la traversée de la pandémie de covid-19 et de ses effets sur un enseignement de didactique des sciences sociales et de la citoyenneté, y compris en ce qui concerne sa contribution à la compréhension des enjeux sociétaux de la crise. Pour le présent et le passé, l'enseignement de l'histoire permet de percevoir la pandémie comme un révélateur des inégalités sociales ; de montrer l'importance d'une observation sur plusieurs échelles spatiales et temporelles ; et surtout de mettre en lien cette expérience forte de l'incertitude au présent avec des incertitudes du passé. Pour le présent et l'avenir, l'étude du déroulement et de la complexité de la pandémie contribuent au développement d'une faculté de discernement, autour de ses deux piliers étroitement imbriqués que sont les savoirs et le caractère non-prescriptif de leur construction. Alors que l'issue reste incertaine, des savoirs et une pensée critique que l'on s'approprie ont encore à produire du discernement et de l'autonomie.

Dans le cadre de la formation initiale des enseignant-e-s lors de la situation sanitaire particulière des années 2020 et 2021, nous nous intéressons dans cet article à l'enseignement-apprentissage, plus particulièrement à la construction des compétences et aux interactions avec les étudiant-e-s depuis notre perspective de formatrices en didactiques (au niveau tertiaire). À partir de récits d'expériences de formation touchant diverses disciplines – didactiques des langues, des arts et de l'éducation numérique –, nous discutons des adaptations des contenus, du format d'enseignement mais aussi des dynamiques d'interactions avec les étudiant-e-s.

Les crises provoquées par la covid-19 au Brésil, largement exacerbées par l'instabilité politique du pays, ont mis à nu l'invisibilité des préjugés et la négligence envers l'enfance. Comment les enfants en âge scolaire ont-ils vécu la pandémie ? En adoptant une visée clinique, l'article interroge la perception d'un enfant, âgé de 12 ans, vivant dans des conditions de vulnérabilité sociale. Après avoir esquisser le cadre théorique et conceptuel de la recherche pour faire face aux enjeux épistémiques posés par la spécificité de l'approche biographiques avec les récits d'enfants, la seconde partie du texte est consacrée à l'analyse des récits et aux résultats concernant les modes dont l'enfant donne du sens aux expériences vécues dans une perspective à la fois herméneutique et autopoïétique. Les considérations finales portent sur les contributions des récits d'enfants pour l'avancement de la recherche sur l'enfance en sciences de l'éducation.

Cette contribution propose de revenir à partir d'une enquête par questionnaire sur les rapports à l'enseignement à distance des étudiant·es de licence 2 et 3 inscrits en sciences de l'éducation à l'Université d'Aix-Marseille. Pendant les périodes de confinement de l'année 2020 les cours ont été donnés en ligne, sans toutefois que l'ensemble des enseignant·es puissent bénéficier d'une formation spécifique ni que l'on puisse s'assurer que les étudiant·es possédaient le matériel nécessaire et évoluaient dans des conditions rendant envisageable la poursuite de leur cursus. Vécus ni comme une opportunité enthousiasmante ni comme un enseignement impossible, les cours en ligne apparaissent plutôt comme un enseignement dégradé dont l'expérience s'est faite au sein d'un contexte où les sociabilités étaient largement affaiblies.

Cet article analyse la façon dont la crise de la covid-19 est entrée dans l'université à deux points de vue : comme un évènement déstabilisant, amplifiant les difficultés antérieures ou latentes, révélant la condition fragile des universités françaises et certaines de leurs forces vives, mais aussi comme une brèche ouvrant vers des expériences originales, voire inédites, permettant de produire du sens et de faire lien différemment entre disciplines d'une part, et entre université et société d'autre part.

En 2020, la pandémie de la covid-19 a contraint la communauté universitaire à effectuer plusieurs aménagements pour continuer à offrir et permettre de suivre une formation de qualité. Les changements opérés se situaient d'une part au niveau des modalités d'enseignement et des moyens ou contenus d'évaluation associés, et d'autre part au niveau des activités de formation pratique et de recherche, l'accessibilité aux terrains ayant été compromise. Dans la maitrise « Approches psychoéducatives et situations de handicap », les conséquences de cette crise sanitaire a eu plusieurs impacts sur la réalisation des stages obligatoires. Nous avons interrogé les étudiant·es quant à leur vécu, en le mettant en lien avec le concept de qualité de vie. Cette dernière ayant été en effet fortement impactée pour toute la population, nous souhaitions faire un état des lieux auprès des étudiant·es et proposons, au regard de leurs réponses, des pistes de réflexions.

Lors d'une recherche sur la socialisation organisationnelle des étudiants en première année d'une école suisse de management hôtelier, nous avons comparé deux cohortes, l'une débutant en présentiel, l'autre largement à distance en raison de la pandémie de covid-19. La comparaison montre les effets délétères de l'enseignement à distance sur la satisfaction, l'épuisement et l'intention de poursuivre ses études ; contre toute attente, l'implication affective et l'identification à l'égard de l'école ne sont pas altérées par ce fonctionnement. L'étude de la seconde cohorte nous a permis d'examiner les ressources individuelles et situationnelles permettant de contrer les risques de l'enseignement à distance. Il ressort que les comportements autorégulés d'apprentissage et les comportements proactifs de socialisation, ainsi que le climat de sécurité psychologique dans l'équipe et l'identification à l'équipe, limitent ces conséquences négatives. À partir de ces résultats, nous identifions des pistes d'action pour nourrir des pratiques d'enseignement à distance salutaires pour les étudiants.

Le but de cet article est de présenter les impacts provoqués par la pandémie de covid-19 dans la formation médicale, dans le contexte de la Faculté de médecine de Petrópolis (Brésil), en mettant l'accent sur la façon dont les enseignants de l'unité curriculaire d'ophtalmologie ont mené le processus d'adaptation du cours pour mettre en œuvre un modèle d'EAD (enseignement à distance) auprès de 82 étudiants. Selon les résultats, issus de l'analyse de contenu des réponses des étudiants aux questions ouvertes de l'évaluation du cours et de l'autoévaluation, il est possible d'identifier que, malgré les impacts négatifs provoqués par la pandémie, les professeurs ont pu mettre en place des stratégies favorisant l'apprentissage. Mais des questions demeurent sans réponse concernant les lacunes laissées par les expériences pratiques non vécues, l'acquisition des compétences corrélées et le développement d'apprentissages expérientiels. Répondre à ces questions peut offrir des pistes pour l'amélioration de la formation dans le contexte actuel de transformations sanitaires, éducationnelles et sociales.

Cet article propose une réflexion sur la manière dont la crise pandémique a révélé, voire exacerbé des dimensions habituellement occultées de l'expérience doctorale. L'analyse repose sur les témoignages écrits de quatre doctorantes invitées à tenir elles-mêmes la plume pour coucher sur le papier leur expérience. La démarche d'enquête compréhensive et le principe méthodologique de non-directivité qui président à la production des récits donnent lieu à l'expression de témoignages singuliers qui mettent en évidence différentes facettes de l'expérience doctorale en temps de pandémie. La préoccupation commune qui se dégage suggère que la pandémie renforce les questionnements des doctorantes sur le sens politique du travail de thèse. Deux aspects entrent particulièrement en résonance. Le premier concerne leur propre contribution à la fabrication d'inégalités épistémiques, dès lors que l'appropriation des savoirs universitaires leur parait réservée à une toute petite portion de population autorisée à s'en saisir. Le second concerne l'importance de prendre en compte et de rendre compte des liens qui se tissent entre le chercheur ou la chercheuse et les acteurs sociaux et actrices sociales concernées par l'objet de ses recherches tant ils et elles paraissent coconstituer les connaissances académiques produites in fine.

L'expérience de la pandémie de covid-19 et de ses conséquences sur notre vie professionnelle a bouleversé nos méthodes de travail, notamment sous l'injonction du « distanciel ». Les recherches qualitatives en sciences sociales, qui s'appuient par exemple sur des entretiens et donc, traditionnellement, sur des rencontres en présence en ont été les premières affectées. Si, dans ces recherches, l'entretien qualitatif en présence semble la règle, l'entretien à distance peut, dans certains cas, permettre l'aboutissement d'une recherche lorsque celle-ci fait face à des difficultés exogènes. Cet article a pour vocation de questionner l'impact d'une situation particulière (la pandémie de covid-19) sur une pratique relativement cadrée et rôdée des sciences sociales (l'entretien semi-directif) et de partager une expérience de recherche singulière ou du moins circonstancielle.

Cet article interroge l'effet de la pandémie sur la phase de transition entre la fin des études et l'entrée dans la profession. Pour aborder ce sujet, nous analysons les résultats d'une large enquête sur l'insertion professionnelle conduite annuellement auprès des nouveaux diplômé·es à l'enseignement de Suisse romande et du Tessin. Nous mettons en évidence les effets de ce contexte inédit sur trois moments-clés de l'insertion : la formation initiale, la recherche d'emploi et le vécu professionnel en début de carrière. L'analyse montre une forte hétérogénéité des perceptions quant à l'impact de la situation sanitaire sur la formation. En ce qui concerne la recherche d'emploi, l'impact de la pandémie est considéré comme minime. En revanche, le vécu professionnel des nouveaux/elles diplômé·es a été impacté négativement pour une majorité d'entre eux/elles. Cet article met en lumière les défis que soulèvent la transition vers la profession dans un temps où les pratiques sont bouleversées.

Resumo – Este artigo tem por objetivo apresentar o projeto Arquipélago de memórias: pandemia e vida cotidiana de professores, estudantes e pais/mães de alunos (familiares), desenvolvido pela Universidade Federal de Goiás, em parcerias com outras instituições. Mais especificamente, discutiremos a respeito da base teórico-metodológica utilizada e apresentaremos os resultados iniciais das análises dos dados quantitativos1. O referido projeto surgiu no começo da crise sanitária global motivada pela Covid-19, cuja declaração de estado de pandemia (OMS) se deu em 11/03/2020 e, em ato continuum, a recomendação de fechamento de espaços de aglomeração, dentre os quais, os das instituições educativas, sob justificativa do necessário e temporário esvaziamento dos espaços públicos. A finalidade do projeto é captar relatos de vivências de pessoas com ligação direta e indireta com a educação formal, acerca do modo como a pandemia impacta a vida cotidiana. Para este fim, reúne uma rede de parceiros que representam mais de vinte estados do país, estratégia que visa a produzir uma amostra representativa da diversidade do Brasil. O conteúdo dos relatos somente será publicado a partir de 2025, forma de assegurar algum tempo que processe o relato de vivência da pandemia em vestígio de memória do tempo presente. Por esta razão, os dados quantitativos apresentados na terceira parte deste artigo tangenciarão potencialidades temáticas (gênero, trabalho docente, família) dos relatos, articulando-as com resultados de pesquisas publicadas e afins ao par temático educação e pandemia.

Cet article vise à présenter le projet Archipel de mémoires : pandémie et vie quotidienne d'enseignants, d'étudiants et de parents d'élèves (membres de la famille), développé par l'Université fédérale de Goiás, en partenariat avec d'autres institutions. Plus précisément, nous discuterons de la base théorique et méthodologique utilisée et présenterons les premiers résultats de l'analyse des données quantitatives1. Ce projet est né au début de la crise sanitaire mondiale motivée par la covid-19, dont la déclaration d'état de pandémie (OMS) a eu lieu le 11/03/2020 et, dans un acte continu, la recommandation de fermeture des espaces d'agglomération, parmi lesquels, ceux des institutions éducatives, au motif du vide nécessaire et temporaire des espaces publics. L'objectif du projet est de recueillir les récits d'expériences de personnes ayant un lien direct ou indirect avec l'éducation formelle, sur l'impact de la pandémie sur la vie quotidienne. À cette fin, il réunit un réseau de partenaires représentant plus de vingt États du pays, une stratégie qui vise à produire un échantillon représentatif de la diversité du Brésil. Le contenu des récits ne sera publié que dès 2025, afin d'assurer un certain temps pour traiter le récit de l'expérience de la pandémie constituant une trace mémorielle du temps présent. Pour cette raison, les données quantitatives présentées dans la troisième partie de cet article tangenteront les potentialités thématiques (genre, travail enseignant, famille) des récits, en les articulant avec les résultats des recherches publiées et liées à la paire thématique éducation et pandémie.